Plaidoyer pour la Garantie Universelle du Logement que l’Assemblée Nationale vient de voter.

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congrèshlmJ’ai lu, il y a quelques jours que certains députés socialistes hésitaient à voter en faveur de la Garantie universelle du Logement. celà m’a consterné et j’ai redigé un plaidoyer en faveur de cette garantie. Fort heureusement l’immense majorité d’entre eux ont suivi le gouvernement et Cécile Duflot. la loi va passer au Sénat, puis en seconde lecture. Ce plaidoyer servira à convaincre, je l’espère,  les éventuels réticents. En tout cas, voila une réelle avancée sociale qui va se mettre en place.

 La droite a toujours été hostile au mécanisme de mutualisation des risques locatifs. Ce n’est ni nouveau, ni étonnant.  Dans le domaine du logement comme dans d’autres,  elle n’a cessé de privilégier les logiques assurancielles plutôt que  la solidarité collective.

 Mais que des élus de gauche combattent une des plus grandes avancées de la loi Duflot sous prétexte qu’elle risque de « de responsabiliser » des locataires, voilà qui est plus inattendu, et même, carrément consternant.

 Car cette grande idée de garantie universelle des loyers n’est pas une soudaine lubie : elle est l’aboutissement d un long combat engagé par la gauche, des syndicats et des associations. Elle prolonge le dispositif « Locapass », soutien précieux à nombre de jeunes et de ménages modestes. Elle rend concrète la proposition d’une couverture logement universelle formulé en 2001 par le conseil national de l’habitat et reprise par Lionel Jospin dans  son programme présidentiel. Elle est une première étape vers droit au logement pour tous, droit fondamental de la personne humaine.

 Oui c’est un choix politique majeur et il faut l’assumer avec fierté. En commençant par répondre aux faux procès et aux mauvais arguments.

 1.« La garantie universelle déresponsabiliserait les locataires, et pousserait à l’accumulation des impayés ». C’est faux ! A l’évidence cette garantie ne saurait dispenser le locataire de payer son loyer ! Il est essentiel que le déclenchement de l’appel à la garantie soit rapide (moins de 2 mois, car plus la dette s’accumule, plus son remboursement devient difficile)  et s’accompagne immédiatement des procédures de recouvrement. Evidemment, il convient de faire la part entre le locataire de mauvaise foi et celui qui connait de réelles difficultés. Ce dernier peut déjà faire appel aux mécanismes de solidarité comme le FSL où d’aide sociale si besoin. Avec le nouveau système,  la procédure gagne en rapidité et en pertinence.

 Aujourd’hui, les propriétaires qui sont privés de la rentrée de loyers, souvent indispensables pour eux, n’engagent pas toujours les démarches judiciaires adaptées, ou alors elles le font tardivement et sans prévenir les services sociaux (ce qui d’ailleurs ne relève pas nécessairement de leur compétence). Du coup, les impayés s’accumulent et ne sont pas remboursés, les procédures de menaces d’expulsions viennent déstabiliser des familles déjà en difficulté et tout le monde y perd.

 S’agissant des mauvais payeurs, l’engagement de procédure de remboursement par un fond public sera certainement plus dissuasive que d’hypothétiques et longues réclamations d’un propriétaire privé.

 2- « cette garantie sera pas un gouffre financier ». Là encore, contre vérité ! Cette garantie ne saurait se substituer aux fonds sociaux existants. Si une somme permettant la constitution d’un fond de roulement sera nécessaire au début, les  dépenses annuelles d’impayés restant dus sont limitées.

 En effet, toutes les études ont montré que la part des impayés de loyers non remboursés 3 ans après est très faible.

 Les plus alarmistes annoncent une somme de 2 milliards d’Euros. C’est, a l’évidence,  très surestimé. Et c’est malvenu de la part de ceux qui, en créant les avantages Sellier et autres allégement fiscaux sur les intérêts d’emprunts des accédants, ont non seulement contribué à produire des logements chers mais ont surtout aggravé les déficits de près de 3 milliards d’euros.

 3- « c’est l’Etat qui paiera pour les impayés de loyers ». D’abord, les fonds publics le font déjà avec le FSL pour les personnes en difficultés. Mais il est hors de question de payer les impayés de locataires de mauvaise foi : il s’agit  seulement de faire l’avance aux propriétaires. Ce qui est prévu, c’est que les contributions des propriétaires et des locataires qui abonderont cette garantie universelle.

 4- « le mieux serait de généraliser l’obligation d’une assurance « impayés de loyers ». On reconnaît là les arguments du lobby des assureurs. Ceux là omettent deux choses essentielles, la première est que le principe d’une assurance est de fixer la prime due au regard des risques et du scoring établi en fonction de la situation de l’assuré. Ainsi les plus fragiles paieront plus que les autres. C’est bien une différence majeure avec la mutualisation qui garantit les mêmes droits à tous, chacun y contribuant à proportion de ses facultés. De surcroît, on voit bien qu’ainsi, un propriétaire qui sera mis à contribution pour payer une assurance, fut-ce partiellement, aura tendance à retenir les locataires présentant, à ses yeux, les moindres risques. Ce qui accroîtra les inégalités.  La droite a tenté de transformer la  GRL crée par le 1% logement en système assuranciel et c’est en partie une raison des limites du dispositif.

 Plutôt que de reprendre à son compte ces arguments de mauvaise foi, il me paraît plus opportun de se concentrer sur le calibrage financier du dispositif, mais surtout d’assurer une gestion proche du propriétaire et du locataire. Si un établissement public doit collecter et gérer les fonds, le déclenchement et le suivi de la mise en œuvre de la garantie doit associer les professionnels, sur des bases territoriales, et éviter le piège d’une gestion technocratique lourde et lente. Enfin, il convient d’organiser le lien entre les gestionnaires qui déclencheront le fond de garantie et les professionnels et acteurs sociaux qui doivent assurer la prise en charge des familles en difficultés : voilà un point décisif.

 Tout cela exige beaucoup de pragmatisme, imposera des pratiques nouvelles mais assurera aussi un pacte nouveau entre locataires et propriétaires. Ces derniers doivent avoir la certitude de toucher leur loyer, de retrouver à la fin du bail un logement en bon état, d’obtenir un rendement raisonnable, non spéculatif, mais régulier de leur capital mis en location. Quant au locataire, il ne doit plus se voir imposer des conditions de garanties extravagantes, parfois impossibles à réunir pour accéder à un logement. Il doit être accompagné face aux aléas de l’existence. C’est ainsi une double sécurité, une double protection tant nécessaire dans une société  où l’instabilité, la précarité minent de plus en plus de monde et détériorent les rapports sociaux.

 A chaque fois, qu’on modifie les habitudes et qu’on  veut réguler un secteur qui ne saurait être traité comme un marché comme un autre, à savoir l’habitat, les libéraux, les tenants d’une société de rentes, agitent le spectre de l’abandon des propriétaires qui ne loueraient plus leurs biens.  Ce phénomène n’est absolument jamais vérifié et le nombre de bailleurs personnes physiques tend plutôt à s’accroître. La baisse du nombre de bailleurs privés a surtout observée, à partir du milieu des années 80,  avec la fuite des bailleurs institutionnels ( assurances, banques, établissements de crédit) quand les lois de dérégulation les ont incités à quitter le placement pierre au profit des placements financiers spéculatifs. Ramener ces opérateurs à produire du logement intermédiaire est l’un des chantiers du gouvernement. Mais, de grâce n’alimentons pas les fantasmes ! La mise en œuvre de la garantie locative universelle n’est pour eux en aucun cas un handicap,  c’est plutôt un avantage.

 Les parlementaires de gauche feront œuvre de progrès social en votant cette garantie  attendue par tant de nos concitoyens petits propriétaires comme locataires.

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