Bruxelles prépare une directive visant à restaurer la qualité du milieu marin

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Article publié dans le quotidien Les Echos
PASCALE BRIAND

La commission Environnement des Communautés européennes doit examiner demain en première lecture la future directive « Stratégie pour le milieu marin », dont l’architecture est comparable à celle relative à l’eau douce.Après l’eau douce, l’eau de mer.

La commission Environnement des Communautés européennes se réunit
demain pour examiner un projet de directive consacré à la protection
des milieux marins qui viendra compléter un dispositif déjà en
application pour l’eau douce. Face aux nombreuses menaces pesant sur
les océans et les mers, les efforts de chacun ne suffisent plus. Le
projet de directive, dont le rapporteur est le député français
Marie-Noëlle Lienemann, a la même architecture que la directive sur
l’eau douce, qui impose à chaque Etat européen de parvenir à un bon
état de l’eau d’ici à 2015.

Atteindre un bon état du milieu marin est le prochain défi à relever.
Pour cela, le mode opératoire est le même : chaque pays doit faire un
diagnostic partagé avec ses voisins de la situation des régions marines
qui le concernent, se fixer des objectifs et se doter d’un programme
permettant de les atteindre. Des points d’étape et des indicateurs
pertinents devront être définis et transmis à Bruxelles régulièrement.
Tous les rapports scientifiques convergent sur le constat d’un milieu
marin fragilisé : appauvrissement de la diversité biologique,
contamination par des substances dangereuses, dégradation ou
perturbation y compris par des nuisances sonores des habitats marins,
prolifération d’algues toxiques…

Or le milieu marin est un capital précieux, un patrimoine commun dont
l’importance écologique, sociale, économique pour le présent et le
futur de l’humanité appelle une attention extrême. Le projet de
directive entend prendre en compte la complexité de cet écosystème par
une approche globale, intégrant les problématiques scientifiques,
environnementales, sanitaires, industrielles et commerciales. Il s’agit
de protéger la biodiversité en évitant par exemple de réduire les
populations de thon rouge en Méditerranée ou de surexploiter les bancs
de cabillauds en mer Baltique, tout en permettant un développement
économique durable de la pêche et de ses infrastructures. Bruxelles
estime ainsi que le chiffre d’affaires des entreprises de pêche
britanniques pourrait tomber à 30 % en l’absence de modernisation et de
gestion correcte des stocks.

L’exception de zones spéciales

Le projet de calendrier d’exécution, encore en discussion, pourrait
varier notamment en fonction de l’ambition des objectifs fixés. La
version actuellement présentée prévoit un délai de quatre ans à partir
du moment où le texte est publié, pour faire l’état des lieux sur des
bases scientifiques et définir le bon état écologique pour chaque
région marine. Ensuite, chaque pays dispose d’un an pour préciser les
objectifs à atteindre au plus tard à l’horizon 2021 ou 2025.
Entre-temps, des points d’étape réguliers devraient permettre de faire
le point sur les données issues des plans de surveillance et de
vérifier ainsi la réalité de la mise en oeuvre des actions. Les grandes
villes européennes peinent déjà à respecter les objectifs de la
directive sur le traitement des eaux usées qui date pourtant de 1991.

Les débats devraient être vifs, car le texte prévoit d’autoriser les
Etats à définir des « zones spéciales », là où ils estiment ne pas
pouvoir atteindre, dans les temps fixés, le bon état écologique.
Pragmatisme et principe de réalité pour les uns, cette disposition
apparaîtra pour d’autres comme un moyen d’échapper à la contrainte. Les
associations de défense de l’environnement suivront également avec
attention la définition et la place accordée au développement de zones
protégées et de réserves naturelles marines. Regroupées en coalition,
les principales ONG souhaitent enfin que le texte instaure une
obligation d’obtenir le bon état écologique et non pas seulement
l’élaboration d’une stratégie.

Le milieu marin en chiffres16 % de la population européenne résident
sur le littoral.50.000 tonnes d’algues sont ramassées sur le littoral
breton chaque été.90.000 personnes dans le monde sont touchées chaque
année par des biotoxines marines.53 % des eaux usées déversées ne sont
pas traitées en Méditerranée, et seulement 25 % de la population sont
connectés à une usine de traitement en Europe centrale et dans les pays
de l’Est.90 % des effluents pétroliers déversés par les industries et
les villes dans la mer ont été supprimés depuis le milieu des années
1980, selon les Nations unies.

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