De grands doutes et une réelle déception après la déclaration de politique générale

Partager sur facebook
Partager sur twitter
Partager sur linkedin

drapeau françiqJe l’ai dit sur France-Inter hier matin : l’abstention sur le vote de confiance au gouvernement me paraissait, après les propos du chef de l’Etat et la nomination de Manuel Valls, incontournable.

Je redoutais que le premier ministre ne réponde à aucune des demandes d’inflexions que 88 députés socialistes avaient énoncées pour prendre en compte l’attente des français, et en premier lieu celle des catégories populaires et moyennes. Il s’agissait de la réorientation des politiques européennes en desserrant l’étau et en abandonnant la marche forcée vers la réduction des déficits, de la mise en œuvre rapide d’un plan de relance des investissements et du soutien au pouvoir d’achat pour  relancer la croissance et l’emploi, la remise à plat du pacte de responsabilité. Cette somme est quasiment inatteignable, et nous ne nous en approcherons pas sans plomber la croissance et mettre à mal notre modèle social et républicain.

Le discours de Manuel Valls n’a en rien répondu à ces attentes : il a accru nos inquiétudes. Je salue les 11 députés socialistes qui se sont abstenus sur le vote de confiance, en particulier Jérôme Guedj et Suzanne Tallard  qui ont manifesté leurs convictions et la cohérence de leurs engagements au sein de Maintenant La Gauche.

Il réaffirme, sans la moindre inflexion, la mise en œuvre du pacte de responsabilité: 30 milliards sans contreparties ni engagements du patronat. La suppression de toutes les cotisations sociales sur le SMIC est sensée renforcer les embauches de salariés peu qualifiés et créer des emplois. Mais  tout cela est très illusoire si les entreprises n’ont pas leurs carnets de commandes remplis et c’est là où l’absence de relance du pouvoir d’achat est dramatique. Les entreprises vont empocher l’allégement fiscal sans recruter. Ensuite, cette mesure coûte cher et va profiter à des secteurs qui n’ont pas besoin d’être soutenus alors qu’elle a très peu d’impact sur l’industrie ou les entreprises soumises à la concurrence internationale qui ont besoin d’aides plus significatives pour relancer nos exportations. Parler de relance de la compétitivité est, en réalité, inexact. Enfin chacun voit bien que cette mesure va renforcer le système de trappe aux bas salaires car les augmentations deviendront très couteuses aux entreprises qui basculeront en sortant du niveau du SMIC dans un versement de cotisation. Comment va être financée durablement notre protection sociale ? Là, le premier ministre est muet. Or cette gravissime fragilisation de la protection sociale est attendue par les libéraux pour à terme la réduire. Même le financement des accidents du travail, nombreux chez les salariés au SMIC, ne seront plus payé par les entreprises !!!

Il faut souligner que ce pacte de responsabilité n’est plus approuvé par une majorité des syndicats puisque au-delà de la CGT et de FO, la CGC vient de retirer sa signature.

Et comme si cette injection massive de fonds publics ne suffisait pas, Manuel Valls a annoncé la suppression de la C3S en 3 ans pour 6 Milliards d’Euros, et la baisse de l’impôt sur les sociétés. Par ailleurs ces dépenses supplémentaires ne sont en rien financées. Là encore, comment va-t-on financer les régimes de protections sociales des indépendants et des agriculteurs ?

La question du financement de notre protection sociale est la grande impasse de la politique du gouvernement Valls et ce n’est pas une mince affaire !

C’est donc près 40 milliards d’euros qui seront versées aux entreprises.

En face, le président avait annoncé un pacte de solidarité sensé améliorer le pouvoir d’achat et développer, des actions en faveur de la santé et de l’éducation.

Ce pacte de solidarité est une véritable peau de chagrin.

Si l’on peut se réjouir que soit annoncée une amélioration de la feuille de paie des smicards à hauteur de 500 euros par ans soit 41,6 euros par mois. D’ailleurs, si sous Sarkozy, le smic avait été indexé sur les prix, il aurait dû être augmenté de 56 euros  en 2012. Le rattrapage n’est donc pas compensé et cela sans même tenir compte des retards accumulés depuis. Si on avait fait chaque année un coup de pouce au smic de 1% depuis l’élection de François Hollande, on  serait au même niveau que celui que l’ promet pour 2015 !! Car dans l’immédiat, rien de nouveau.

Une hausse du smic a un impact sur bon nombre des autres salaires… Pas là ! Pendant ce temps le pouvoir d’achat des autres salariés lui va stagner ou se réduire.

Cette mesure pouvoir d’achat devrait être immédiate et de plus grande ampleur nous avons fait une contre-proposition en mettant en œuvre la progressivité de la CSG et pour un équivalent de 100 euros par mois pour les bas salaires.

D’autres aménagements fiscaux sont annoncés pour les ménages modestes, sans grandes précisions ni échéanciers.

Le premier ministre indique que l’ensemble de ces mesures couteront 5 Milliards à l’horizon 2017.

Cherchez l’erreur : 5 Milliards horizon 2017 pour le pouvoir d’achat des salariés et français modestes et 30 milliards tout de suite puis 40 Milliards ensuite pour les entreprises.

Tout cela payé par les contribuables. Et les contribuables se sont essentiellement les ménages !

Car faute d’une réforme d’ensemble qui remette de la justice fiscale indispensable dans ce pays, ce sont bien l’ensemble des couches moyennes et des foyers modestes qui vont payer.

Il faut, hélas, constater que les prélèvements ont augmenté de 60 Milliards d’euros entre 2011 et 2014, payé pour les 2/3 par les ménages et même par 90% d’entre eux depuis l’alternance…

C’est injuste socialement et inefficace économiquement.

Outre le fait que les aides aux entreprises sont ruineuses et ne sont pas correctement ciblées pour redresser l’industrie et les exportations, le pseudo « geste » pour le pouvoir d’achat est à des années lumières de ce qui permettrait un regain de consommation intérieure capable de soutenir la croissance et l’activité des PME très dépendantes de la demande intérieure. D’ailleurs, le gouvernement ne prend plus d’engagement en termes d’emploi.

Enfin, Manuel Valls a rappelé les annonces faites par le Président de la République  le 1er janvier  avec  la réduction de la dépense publique de 50 Milliards en 3 ans. Mais grand silence sur les dépenses publiques qui vont être ratiboisées. Et pour cause. Sans doute attend-t-on la fin du cycle électoral pour ne pas mécontenter les Français qui vont vite mesurer les conséquences dramatique d’une ponction brutale sur leur sécurité sociale, le fonctionnement des collectivités voir de l’état.

Mais retenons que quoiqu’il en soit de ces conséquences, cette réduction sans précédent sera une hémorragie d’investissements et plombera la croissance française. Du coup, la pseudo baisse des déficits n’aura pas lieu, car les recettes ne seront pas conformes aux prévisions !  On a vu ailleurs ce cycle infernal. Mais obsédé par l’alignement sur des politiques européennes dramatiques qu’il  a renoncé à réorienter, le président persiste et signe et prend le risque d’envoyer notre pays dans le mur.

Ce n’est pas seulement au nom de notre idéal de gauche que l’abstention se justifiait lors du vote de confiance mais parce que nous sommes inquiets pour l’avenir du pays.

Mais il est aussi fort probable que cette réduction de 50 Milliards ne sera pas atteinte et qu’une fois de plus nous irons à Bruxelles prenant un air piteux de mauvais élève pris en défaut. C’est insupportable de voir la France, contributeur net, deuxième économie de l’UE, pays fondateur et force politique majeure poursuivre cette stratégie qui l’affaiblit. Il faut dire haut et fort que nous ne continuerons pas ces politiques d’austérité que nous contestons et imposons la renégociation de la feuille de route de sortie de crise.

Valls n’a rien dit sur les politiques européennes si ce n’est quelques mots vagues sur l’Euro – pour faire plaisir à nos amis du MRC- qui n’engagent à rien.

La grande idée pour trouver ces 50 Milliards et réduire la dépense publique serait de regrouper les régions et de faire disparaitre les départements !! D’abord aucune étude sérieuse n’a mis en exergue que cette méthode faisait faire de substantielles économies, ensuite ça va immédiatement et pendant plusieurs années couter cher en études, audits etc… Ensuite simultanément supprimer qui gère l’action sociale, l’aménagement rural et regrouper les régions va considérablement éloigner les élus et les collectivités des citoyens. En général tout le monde est d’accord sur les grands principes et des qu’on voit leur application tout le monde est contre.

Quand un habitant du Gers verra qu’il faudra se tourner vers Bordeaux ou Montpellier pour un problème d’APA ou autre plutôt qu’Auch ou Toulouse, je ne suis pas sûr qu’il y voie un progrès.

Supprimer les départements exige sans doute de modifier la constitution. Mais que tel soit le cas ou non, bouleverser à ce point l’organisation des collectivités territoriales mérite un débat sérieux et un vote du peuple donc un référendum.

Nous n’avons pas été jusqu’à ce jour entendus, en dépit du message clair de nos électeurs, nous continuerons à faire des propositions à chaque vote comme nous le faisons depuis déjà 2 ans pour éviter cette voie néolibérale et pour que les engagements pris devant les électeurs ne soient pas passés par pertes et profits.

Nous persistons et pensons qu’être socialistes en France aujourd’hui c’est permettre à notre pays de retrouver confiance en lui, de redonner force et actualité à son modèle républicain et d’assurer son redressement dans la justice.

LES DERNIERS ARTICLES