Florange : il fallait hier nationaliser, il faut aujourd’hui recréer des emplois de production

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François Hollande est aujourd’hui à Florange pour poser la première pierre d’un centre de recherche, tenant ainsi l’engagement d’y revenir chaque année.

haut fournauxPourtant Florange restera, pour le quinquennat de François Hollande et sans doute pour la France, une occasion manquée, une blessure qui laisse un goût amer à tous ceux qui pensent que la politique doit permettre aux peuples de maitriser leur destin et non le subir.

Pour la gauche, la fermeture de ces hauts fourneaux a sonné comme  une énième rupture avec cette classe ouvrière qui attend que le pays reconnaisse enfin qu’elle fait partie de son avenir.  C’est aussi une espérance déçue pour tous ces salariés qui attendaient le changement et la tenue des engagements pris.

Ne sont-ce d’ailleurs pas ces sentiments mêlés d’abandon, d’absence d’avenir, de perte de souveraineté et de confiance en la politique qui permettra la victoire du FN dans la ville voisine d’Hayange et la perte par la gauche de la commune de Florange, lors des municipales du printemps dernier ?

Certes, le président peut se prévaloir d’une relance d’activité avec un centre public de recherche et d’innovation sur le site, de l’investissement par Mittal de 180 millions d’euros et d’une solution sociale  pour chaque salarié.

C’est évidemment sans commune mesure avec la fermeture de Gandrange où Nicolas Sarkozy n’avait rien obtenu du sidérurgiste. Mais je le rappelle avec force, il fallait nationaliser, même de façon temporaire, pour assurer la mutation du site -si besoin était- et pour le conforter avec un centre de recherche comme avec l’expérimentation du stockage du C02.

Il fallait nationaliser parce que l’avenir d’une filière comme celle de la production d’acier dans notre pays ne peut être laissée de façon aussi dominante entre les mains d’une multinationale dont la logique de groupe n’a rien à voir avec l’intérêt national de la France.

Il fallait nationaliser, car lorsqu’on ferme un site de production, c’est extrêmement difficile d’en rouvrir un ensuite, surtout lorsqu’il s’agit de l’industrie lourde et qu’il faut en matière industrielle mener de concert une stratégie offensive (nouveaux secteurs etc..) et défensive (mutation, modernisation, montée en gamme et technologique de l’existant).

En réalité la raison du refus de la nationalisation temporaire procède largement d’une posture idéologique que les propos de Jean-Marc Ayrault avait de fait souligné, lors-qu’interrogé sur ce rejet  il avait répondu «  on voit bien ce qu’ont donné les nationalisations en 1981 ». Or justement, ces nationalisations avaient permis le redressement, souvent dans la douleur, de pans entier de la sidérurgie. Constatons qu’aujourd’hui, lorsque Mittal se lance à la conquête d’Arcelor, il n’y a plus de capital public français tandis que les luxembourgeois, les Wallons et certains Lander allemands en possèdent encore et sont mieux pris en compte dans les décisions ultérieures.

Rappelons au passage qu’une très large partie des français étaient favorables à cette nationalisation.

Mais cette crispation idéologique demeure aujourd’hui vive. En effet dans la charte sur l’identité socialiste, si dans un langage technocratique de bon aloi il est rappelé l’importance du capital public, la direction du PS a refusé de faire référence aux nationalisations (temporaires ou durables).

L’ouverture du centre de recherche est une bonne nouvelle. Mais, elle laisse entière la question de la production et des emplois industriels. Comment la recherche publique ou privée dans ce secteur va permettre d’ouvrir de nouvelles usines, de nouveaux sites de production en France et en Lorraine ? Quelle stratégie de filière pour l’avenir ?

A ces questions fondamentales, car il en va de la souveraineté économique de la France, nous n’avons aucune réponse. Les syndicalistes qui devraient au premier chef être concernés, associés, informés, non plus. Pire, le Président a été dans l’incapacité de réunir autour de lui toutes les organisations syndicales. Ce qui n’est jamais bon signe.

Il n’y aura pas de redressement industriel de la France sans ouvriers, sans usines, sans site de production. L’ouverture d’une activité à Commercy pour la fabrique de pièces pour l’industrie aéronautique va dans le bon sens, pour autant ne centrons pas notre industrie uniquement sur les secteurs traditionnels. La diversification industrielle de notre pays est un enjeu majeur.

Il n’y aura pas de reconquête à gauche sans la confiance retrouvée du monde du travail.

On ne peut pas dire que le chemin pris soit convaincant. Quand le Président acceptera-t-il d’engager le débat sur la nécessaire réorientation de sa politique ? Rester sur ces rails est dangereux, pour la fin du quinquennat, pour la gauche et pour la France.

Au-delà, à Florange, François Hollande, alors candidat, avait promis une loi qui obligeait les grandes entreprises de chercher un repreneur en cas de cessation programmée d’un site et l’obligation d’accepter une offre de reprise sérieuse. Une telle loi est passée mais de façon très édulcorée car le conseil constitutionnel avait jugé  les sanctions trop lourdes. Désormais, elles pourront être amenées à rembourser des aides publiques qu’elles auraient touchées. Mais ce concept d’aide public est actuellement juridiquement très restreint, ne concernant d’ailleurs ni les allègements de cotisations, ni les aides fiscales si ces dernières ne sont pas conditionnées ( cf débat sur CICE).. Un dispositif plus symbolique qu’efficace en définitive.

Le peuple de gauche n’a pas besoin de symboles mais d’actes, de résultats. A Florange, il sera manifestement difficile de rattraper les erreurs commises au début du mandat.

Mais tout cela ne répond pas aux questions majeures qui se posent aux salariés, à la Lorraine et aux français.

 

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