La victoire de Syriza offrirait une chance historique pour l’Europe et pour la France

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Syriza_22-01-2015_AthenesNe vendons pas encore la peau de l’ours, les sondages en Grèce ne font pas nécessairement l’élection. Pas plus en Espagne. Pour autant, sonnent dans ces pays le tocsin contre les politiques d’austérité et les réformes structurelles, mot pudiquement utilisé en lieu et place de dérégulations, privatisations et reculs sociaux.

Nous devons souhaiter la victoire de Syriza et, pour ma part, j’appelle mes amis grecs à voter pour leurs candidats.

C’est important pour nous tous Européens. C’est important pour nous Français.

Car s’ouvrirait ainsi une formidable opportunité pour le Président de la République de reprendre l’offensive pour une réorientation majeure des politiques européennes. Il y a désormais une urgence absolue à exiger la sortie des dogmes austéritaires et de proposer une véritable stratégie de relance.

Or, ne nous y trompons pas, nous en sommes encore très loin et on ne pourra pas se contenter de la baisse de l’euro, du prix du pétrole ni même encore des récentes annonces de la BCE ou du pseudo plan Juncker.

D’abord, rappelons que la déflation, la très faible croissance qui paralyse notre continent, comme la désindustrialisation, viennent de loin. Elles sont la conséquence des politiques malthusiennes du pacte de stabilité qui, depuis le traité d’Amsterdam en 1997, gravent dans le marbre les fameux critères de Maastricht, privant les peuples européens de pouvoir décider du cadre macro-économique nécessaire, en particulier lorsqu’il faut soutenir une croissance atone par les investissements et le pouvoir d’achat. C’est le libéralisme pur et permanent : toujours baisser la puissance publique, ne pas investir dans l’avenir et refuser l’endettement, tandis que le dumping social et fiscal va bon train au nom de la concurrence libre et non faussée. Les résultats étaient écrits d’avance : accroissement du chômage, des inégalités, précarité, montée de la pauvreté, croissance atone et remise en cause des protections sociales et services publics.

On aurait pu espérer que face à la crise financière, devant le constat que les résultats de cette politique n’étaient non seulement pas au rendez-vous, mais totalement contraires aux mirifiques promesses qui devaient concrétiser cette Europe, chantre de la mondialisation libérale, les dirigeants de l’Union Européenne dans les années 2010 changent de cap, débattent d’un autre chemin.

Que nenni…

Si tout allait mal, c’est parce que nous n’avions pas été assez loin dans la direction qui chaque jour pourtant nous rapproche du mur. Or, nous y sommes : déflation, croissance faible. En dépit, et sans doute à cause, des « réformes structurelles », les dettes augmentent dans les pays su Sud, les déficits n’arrivent pas à se résorber durablement, la crise se prolonge. Et tout cela sans parler de l’essentiel pour nous, à savoir une situation sociale dramatique, des services et infrastructures publiques délabrées dans de nombreux pays.

Madame Merkel porte une lourde responsabilité. Nicolas Sarkozy aussi.

L’Allemagne de Mme Merkel a pesé de tout son poids pour imposer un tour de vis austéritaire et sa vision économique et européenne.

L’histoire retiendra le suivisme de Nicolas Sarkozy qui, tête baissée, emboîte le pas de la Chancelière allemande, se refuse à créer le moindre rapport de force pour défendre l’intérêt de la France et l’avis des Français. Il se contente de négocier des délais alors qu’il serait essentiel de changer de cap. C’était reculer pour mieux sauter.

Nous en payons le prix aujourd’hui. Nous attendions beaucoup de l’élection de François Hollande qui s’était clairement engagé à ne pas ratifier le TSCG sans que s’engage une profonde réorientation de politiques européennes.

S’agissant de la politique européenne, François Hollande n’a pas répondu à l’attente des Français, n’a pas mis en œuvre les engagements pris. Mais il n’est pas trop tard pour aujourd’hui peser de tout le poids de la France pour sortir l’Europe de l’ornière et faire repartir l’Union sur une base de solidarité, de progrès social, de soutien à l’économie réelle, plutôt qu’à la finance.

Mais ne nous y trompons pas, une véritable sortie de crise, une relance effective, ne viendra pas de mesures prises au dernier moment, sous la pression des événements quand la situation est déjà très dégradée. Le sauve-qui-peut ne peut pas faire office de stratégie d’avenir. Et c’est hélas ce que nous constatons aujourd’hui. les Européens ne vont plus longtemps se laisser berner avec des annonces bidons, qui ne prennent pas à bras le corps les vrais problèmes.

Alors François Hollande est à la croisée des chemins. Soit il continue à penser que les améliorations viendront de l’extérieur, de la conjoncture mondiale et qu’il suffit d’être patient ; soit, comme il l’avais promis aux Français, il crée un rapport de force, s’appuie sur la réalité économique changeante, et surtout sur la situation politique nouvelle pour imposer un nouveau cap, une remise en cause des politiques suivies et la négociation d’une feuille de route de relance économique politique et sociale.

Une victoire de Syriza lui offre cette occasion de rebond. S’il ne la saisit pas, les conséquences politiques seront rudes.

Que doit-il faire et proposer ?

1- la suspension immédiate du plan de stabilité.
2- l’établissement d’une feuille de route de sortie de crise fondée sur un plan d’investissement beaucoup plus substantiel que le plan Juncker, financé par un emprunt européen, mais aussi sur un accroissement du pouvoir d’achat des salariés et des couches populaires, en particulier avec la mise en œuvre de convergences des standards sociaux vers le haut mais aussi une harmonisation fiscale et une action radicale contre l’évasion fiscale.

Si la France ne relaie pas une montée de la gauche dans l’Europe du Sud, et je l’espère sa victoire, l’alternative tant attendue par bon nombre de peuples européens viendra d’ailleurs et, on peut le craindre, de l’extrême droite.

Mais cette formidable émergence de Syriza nous donne à tous de vraies raisons d’espérer.

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