élections régionales

Après les Régionales, le sursaut vraiment !

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carte_regionales_2015_departementsLe pays va mal. Il a besoin d’espoirs tangibles, c’est-à-dire de projets d’avenir et de changements concrets qui améliorent vite la situation sociale du pays.

La gauche n’est pas morte mais elle est fragilisée. Fragilisée car désunie, fragilisée car désertée par les ouvriers, les employés, les chômeurs.

Jean-Christophe Cambadélis a paru comprendre la nécessité d’inflexions dans la politique du gouvernement et de changements dans les rapports entre forces de gauche et écologistes. Veillons à ce que ces bonnes intentions ne soient pas le énième feu de paille, ou un faux semblant sans suite effective.

Car, hélas, ce ne serait pas la première fois que le premier secrétaire du PS nous fait miroiter une prise de conscience et la volonté d’inflexions des choix gouvernementaux pour se retrouver impuissant face au refus du gouvernement et du Président. Il suffit de se souvenir de la délibération du Bureau National du 27 juillet dernier proposant des réorientations budgétaires, en cohérence avec les votes du congrès de Poitiers et pour tirer des conséquences des défaites départementales qui ont connu un flop retentissant et n’ont été suivi d’aucun effet.

Or à peine les bonnes paroles de Jean-Christophe Cambadélis prononcées, que le premier ministre, d’autres membres du gouvernement et les commentateurs autorisés de l’Élysée se répandaient dans les médias avec une argumentation inébranlable qui marque ce quinquennat quasiment depuis le début : le « c’est moins pire » et « on ne change pas une ligne qui perd ».

La gestion sérieuse et déterminée des attentats par le Président de la République et le succès de la COP 21 ne peuvent pas faire oublier – surtout à ceux qui les subissent – le chômage et de la faiblesse du pouvoir d’achat. L’explosion du nombre de travailleurs pauvres et de précaires est un vivier pour le Front National. Ce sont sur ces deux points que la réorientation doit être tangible avec un impératif d’avoir des effets immédiats.

La priorité des priorités est la hausse des salaires et de l’indemnisation des chômeurs – en montant et en durée.

Le levier d’intervention de l’État sur les salaires est d’abord la hausse du SMIC qui n’a connu aucun coup de pouce depuis 2012. On aurait dû le faire en janvier, il faut le faire en février ou mars.

Laurent Berger, secrétaire général de la CFDT, estime que l’important est la grille des salaires et de la carrière professionnelle. Certes, et on se demande pourquoi la CFDT n’engage pas des négociations avec le patronat, elle qui estime que l’État doit laisser faire la négociation sociale. Qu’attend-elle ? La réalité est que si l’État n’impulse pas et n’agit pas, rien ne se fera. Il faut donc et augmenter le SMIC et organiser une conférence tripartite avec des négociations par branche sur les grilles salariales.

Mais il y a plus de 3 millions de salariés au SMIC et son niveau est essentiel aussi pour tous ceux qui sont en temps partiel, les précaires pour qui, la carrière professionnelle, la progression dans le niveau salarial est, hélas, à des années-lumière de leur parcours chaotique d’une entreprise à l’autre, en passant par la case chômage.

L’indemnisation des chômeurs est l’autre nœud gordien de la situation actuelle car il y a de plus en plus de chômeurs en France et de moins en moins de chômeurs indemnisés !

Ces deux réorientations sociales auront un effet économique de relance de la consommation qui reste relativement atone sur la longue durée et en baisse (-0,7%) en octobre ; elle est indispensable pour soutenir l’activité des entreprises. Certes, nos efforts de compétitivité doivent renforcer nos capacités exportatrices, mais tel n’est pas encore le cas, d’autant que la conjoncture européenne et mondiale est loin d’être favorable. Il faut soutenir la demande intérieure. Voilà des années que nous prévoyons l’impasse dans laquelle nous conduit la politique centrée exclusivement sur l’offre. Et la courbe du chômage ne s’inverse toujours pas.

Il aurait fallu un autre choix, il faut a minima des « inflexions » !

Dans la même veine, la relance doit aussi être soutenue pas un « Plan République » qui renforce les services publics pour garantir l’égalité des territoires. Qui ne voit que l’abandon de certains territoires pèse lourd dans les votes de nos concitoyens ?

Mais le gouvernement veut-il voir ?

Sévit le « c’est moins pire » que ce que prédisaient les sondages. On ne devait avoir que trois régions et on en a cinq ! La réalité est que la gauche préside 5 régions représentant 20 Millions d’habitants, tandis que la droite en dirige sept avec 42,8 millions d’habitants soit plus du double. La gauche n’est par ailleurs plus représentée dans deux régions comptant 10,9 millions d’habitants soit 15 à 16% de la population française ! Et même sans compter ces deux régions, la droite dirige donc cinq régions de 31,9 habitants, bien plus que celles de gauche.

Le cas de la Corse est à part et la situation dans les DOM a débouché sur la défaite de candidats soutenus par le PS. Le Parti Socialiste aura 320 conseillers régionaux tandis que le FN en comptera 354 !

C’est moins pire ? Pour qui ? Quand on voit le score du FN. Au second tour, il a dépassé le nombre de voix que Marine Le Pen avait obtenu lors de la présidentielle de 2012. On ne peut pas dire que ce n’est pas pire ! Parier sur un score élevé du FN pour se faire élire en triangulaire c’est jouer avec le feu. Surtout que la digue, choisie par la direction du PS et le gouvernement, pour empêcher la victoire du FN est la disparition de la gauche de territoires entiers. Dans ces régions, la succession des défaites municipales, départementales et maintenant régionales, aboutissent à une absence quasi-totale d’élus de gauche dans de nombreux cantons, communes, voir dans certains départements. Quel terrible constat : éviter le FN passe par l’effacement voir la disparition de la gauche. Veillons aux effets de contagion.

Derrière les mots, deux lignes : l’unité des forces de gauche, un bloc central au motif d’un « front républicain ».

Je ne peux m’empêcher de penser à la prophétie quasiment auto-réalisatrice de Manuel Valls : « La gauche peut mourir ». Je pense que cette stratégie anxiogène a une finalité à peine voilée, substituer une « union nationale », un « front républicain », au rassemblement de la gauche, en fait un bloc central rejetant de part et d’autres les extrêmes ! C’est l’antithèse de la conception visant à restaurer un débat républicain autour d’alternatives crédibles, claires, structurantes entre la gauche et les écologistes d’une part, la droite d’autre part.

Mais ces choix, outre les visées de carrières personnelles, révèlent en fait un désaccord sur l’ampleur des changements nécessaires à la société française, à l’Europe :

  • Ceux qui souhaitent ce bloc central, ce fameux « front républicain », estiment au fond que le libéralisme et la logique dominante du système vont dans le bon sens et qu’il convient au mieux d’en corriger les excès, les aspects les plus insupportables ;
  • Ceux qui pensent qu’il est urgent de s’attaquer aux racines des profondes déstabilisations induites par le système et engager, certes par la voie de réformes, des transformations radicales pour imposer plus de justice sociale, une reconquête de la souveraineté populaire et nationale, une nouvelle étape dans l’affirmation du modèle républicain.

L’incantation républicaine sera vite vaine si elle se limite à défendre l’ordre Républicain – qu’il est essentiel de garantir-. La République doit faire la preuve de sa capacité émancipatrice pour tous et tenir sa promesse de Liberté, d’Égalité et de Fraternité… c’est d’ailleurs là, que la gauche devrait être au rendez-vous de l’histoire, de son histoire, en donnant chair à la belle idée de République sociale. Ce n’est pas la République a minima qui répondra à la dureté des temps.

Les tenants de la ligne du « front républicain » surjouent l’importance accordée à la question identitaire pour reléguer complètement la question sociale. Cette situation est apparue clairement au sein du Bureau National du PS, où certes cette analyse était très minoritaire mais venait en écho aux thèses du premier ministre.

La seconde voie est l’exigence d’unité de la gauche et des écologistes. Après trois ans et demi, où elle a été malmenée, elle a impérativement besoin de volonté politique déterminée et durable. Car chacun tentera de refiler le mistigri de la désunion à l’autre, plutôt que de réellement avancer vers un rassemblement crédible. Il convient d’abord d’alerter les responsables socialistes, qui s’imaginent que le PS représente l’essentiel de la gauche, qu’en réalité au premier tour le PS et ses partenaires immédiats représentent 23,43% et les autres forces de gauche et écologistes (certes en ordre dispersé) totalisent 12,54 %. Soit plus du tiers des voix de gauche. Le total gauche n’atteignant que 36% (32,12% au second tour) avec une abstention importante.

Imaginer que la mobilisation face à la droite et l’extrême droite va durablement suffire pour garantir cette union est plus qu’aléatoire et limite cynique. Il faut parler avec nos partenaires, les respecter pour construire de vraies convergences pour l’action gouvernementale aujourd’hui et pour les projets d’avenir à présenter aux Français.

Jean-Luc Mélenchon a raison d’évoquer le Front Populaire. Évidemment, un nouveau Front Populaire. C’est le seul antidote qui vaille : unité et offensive sociale, de progrès. Le seul problème est que Jean-Luc Mélenchon l’imagine sans une partie du PS, et particulièrement celle qui dirige actuellement. Bref pas le rassemblement de toute la gauche, donc pas le Front Populaire.

Entre ceux qui veulent s’affranchir de l’Union et ceux qui ne l’imaginent qu’autour de leurs thèses, s’expriment les deux faces d’une même impuissance collective.

Peut-on en sortir ? C’est la voie que nous défendons depuis longtemps, et que nous devons concrétiser rapidement sauf à faire un grand saut dans l’inconnu pour les présidentielles, comptant sur la chance, la division plus forte à droite, une nouvelle poussée du FN ou un miracle.

Il est urgent de la tracer.

Pour commencer, il faut immédiatement stopper toutes ces réformes qui fracturent la gauche et sont inutiles : la loi Macron II, la réforme du code du travail, l’inscription de la déchéance de nationalité pour les binationaux nés Français dans la constitution.

Il faut aussi relancer immédiatement un dialogue entre les forces de gauche pour préparer une plateforme commune pour les 18 mois à venir et la présidentielle. Il ne faut pas renoncer à porter des réformes de progrès social, d’ici la fin du quinquennat. Parlons-en entre partenaires de gauche et écologistes.

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