Paris

Tribune avec Anne Hidalgo et les parlementaires socialistes sur le statut de Paris dans Le Monde

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4964244_6_fa67_anne-hidalgo-le-2-juin_9875fe70c3da6dd6717dece738cada32Le Monde – 5 juillet 2016 à 16h51

Les relations entre la Ville de Paris et le pouvoir central ont, de tout temps, été singulières. Elles ont été caractérisées, au mieux, par la méfiance, au pire, par la défiance, voire par la violence et la répression. En effet, depuis l’assassinat en 1358, du Prévôt des Marchands Etienne Marcel, en passant par la fronde parlementaire de 1648, la Révolution Française, l’Empire, la Révolution de 1848, le Second Empire, la Commune de Paris, puis Vichy, et, enfin, la Libération, il apparaît clairement que ces relations n’ont pas toujours été sereines et pacifiées, loin s’en faut !

Aujourd’hui, elles sont devenues constructives et apaisées. C’est donc le moment idéal pour passer à une nouvelle étape de la décentralisation en « dépoussiérant » certaines mesures toujours en vigueur. Paris est soumise, dans certains domaines relevant du quotidien, à un statut dérogatoire au sein de la République. Cette dernière pourtant, fait grand cas de l’égalité entre les citoyens, quels que soient leurs origines, et les territoires où ils vivent.

Si ce statut dérogatoire prend parfois légitimement sa source dans le statut de capitale, il convient, sur des domaines bien précis et faisant consensus, de normaliser la situation et de faire ainsi entrer Paris dans le « droit commun ». En effet, à certains égards, le maire de Paris a moins de pouvoir que les autres maires de France. Paris doit devenir, à son tour, une commune de plein exercice sans pour autant lui faire perdre son statut de ville d’exception.

Des empiétements illégitimes

Nous, parlementaires parisiens demandons simplement à ce que Paris soit traitée, sur ces sujets précis, comme l’ensemble des 35 884 autres communes de France, ni plus, ni moins. Bien sûr, il est compréhensible que, là où l’État concentre l’essentiel de ses institutions, les missions de sécurité fassent l’objet d’une centralisation particulière. Il ne s’agit donc pas ici de contester la singularité de Paris, mais de revenir sur un certain nombre d’empiétements illégitimes concernant la démocratie locale qu’elle a fini par générer, sans que l’intérêt bien compris de la République en soit la cause.

Aujourd’hui, Paris doit relever de nouveaux défis : amplifier la solidarité et le développement de nos territoires avec, notamment, l’émergence de la Métropole du grand Paris ; assurer l’égal accès de tous aux services publics ; rendre l’action publique toujours plus efficace et lisible à tous les échelons ; renforcer l’exigence démocratique et associer les Parisiens aux décisions qui les concernent.

Ces enjeux nouveaux nécessitent des adaptations de notre organisation administrative. En accord avec le gouvernement, le Conseil de Paris a lancé, en octobre dernier, plusieurs chantiers portant modification du statut de Paris. En février, le Conseil de Paris a délibéré après de nombreuses semaines de travaux rassemblant l’ensemble des groupes politiques représentés au Conseil de Paris, mais aussi les maires d’arrondissement, les représentants de la préfecture de police et de la préfecture de région. Cette démarche a été guidée par trois principes : la nécessité de faire cette réforme, son exigence de justice et son efficacité pour un meilleur service rendu aux Parisiens.

Un système plus lisible

Elle propose la fusion de la ville de Paris et du département de Paris, l’élargissement des compétences des maires d’arrondissement, l’évolution de la répartition des compétences entre l’Etat et la ville de Paris, et enfin le regroupement des quatre arrondissements les moins peuplés de Paris.

Afin de moderniser l’organisation administrative parisienne, à l’heure de l’émergence de la Métropole du grand Paris, il faut une collectivité unique exerçant à la fois les compétences communales et départementales. Bref, un système plus lisible. Au quotidien, les Parisiens ne font pas la différence entre ce qui relève de la ville de Paris et du département ! La fusion administrative de ces deux entités permettra aussi de dégager des marges budgétaires qui pourront être utilisées au service des Parisiens. Le maire de Paris doit pouvoir appliquer pleinement le programme pour lequel il a été élu. Cette exigence démocratique se traduit par le souhait que le maire de Paris exerce une pleine compétence dans différents domaines, tels que la circulation, le stationnement ou la réglementation des manifestations de voie publique sur l’ensemble des axes de la capitale, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui.

Cela doit bien entendu se faire sans pour autant porter atteinte aux prérogatives du préfet de police en tant que garant de l’ordre public (pour les manifestations revendicatives ou itinérantes), de l’organisation des secours, ou encore de la protection des institutions de la République et des représentations diplomatiques. Dans d’autres champs d’action comme la lutte contre l’habitat indigne, la police des baignades, les questions funéraires, ou encore le nombre des dimanches concernés par le travail du dimanche, le maire de Paris doit avoir les mêmes prérogatives que tout autre maire de France. Autant de domaines qui relèvent du quotidien et qui, pour une plus grande efficacité, doivent être gérés au plus près des citoyens.

Dans ce souci de renforcer l’échelon de proximité qu’est l’arrondissement, tout en améliorant le service public, le Conseil de Paris a également émis le vœu d’un regroupement des quatre premiers arrondissements au sein d’un conseil d’arrondissements ou conseil de secteurs, à compter des élections municipales de 2020. Il faut savoir qu’aujourd’hui le rapport entre l’arrondissement le moins peuplé de Paris et le plus peuplé est de 1 à 15 !

Un tel regroupement permettrait de remédier aux écarts démographiques de représentation, en cohérence avec la jurisprudence du Conseil constitutionnel. Il est possible de le faire sans modifier ni le code postal des arrondissements concernés, ni leur numéro, ni la délimitation des circonscriptions législatives, ni les frontières actuelles des arrondissements et tout en maintenant un rapport des forces politiques au Conseil de Paris inchangé, en raisonnant à partir des résultats des élections municipales de 2014, éloignant ainsi tout soupçon de visées électorales. L’éloignement des prochaines élections municipales – qui auront lieu dans 4 ans – exclut toute volonté partisane. C’est donc le bon moment pour agir, réformer et, ce faisant, renforcer la démocratie à Paris ! C’est l’heure du contrat de confiance !

David Assouline, sénateur de Paris (PS) ; Patrick Bloche, député de Paris (PS) ; Jean-Pierre Caffet, sénateur de Paris (PS) ; Jean-Christophe Cambadélis, député de Paris (PS) et premier secrétaire du parti Socialiste ; Christophe Caresche, député de Paris (PS) ;Fanélie Carrey-Conte, députée de Paris (PS) ; Pascal Cherki, député de Paris (PS) ; Seybah Dagoma, députée de Paris (PS) ; Cécile Duflot, députée de Paris (EELV) ; Anne Hidalgo, Maire de Paris (PS) ; Bariza Khiari, sénatrice de Paris (PS) ; Anne-Christine Lang, députée de Paris (SRC) ; Annick Lepetit, députée de paris (PS) ; Marie-Noëlle Lienemann, sénatrice de Paris (PS) ; Roger Madec, sénateur de Paris (PS) ; Sandrine Mazetier, députée de Paris (PS) ; Daniel Vaillant, député de Paris (PS).

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