Femmes

Violences faites aux femmes : Pour la continuité du 3919

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tribune dans Libération – 24 novembre 2020

Il faut que le gouvernement revienne sur sa décision de mettre en concurrence la gestion de la ligne d’écoute et d’orientation.

Tribune. Depuis 1992, l’association Fédération nationale Solidarité femmes (FNSF) assure la permanence téléphonique de la ligne 3919, une ligne d’écoute et d’orientation pour toutes les femmes victimes de violence. Le succès de cette implication est univoque : le 3919 est devenu la ligne de référence nationale d’aide aux femmes victimes de violence.

Or, le gouvernement actuel s’apprête à lancer un marché public pour une mise en concurrence de la gestion de la ligne 3919. Cette mission de service public tombera alors dans le champ des dispositions de la loi Sapin. Cet engagement associatif serait transformé en délégation de service public, avec la crainte que l’imposition de contraintes financières liées à des objectifs entraîne une réduction de la qualité des prestations.

Implication historique

Nous nous étonnons qu’une telle mise en concurrence, à la manière d’une quelconque offre de services, puisse être entreprise s’agissant d’un service d’aide aux victimes. D’autant plus que celui-ci est assumé depuis plusieurs décennies par une association dont la qualité des prises en charge a toujours été saluée.

Il est à ce point surprenant qu’une telle initiative associative ayant anticipé, précédé et pallié les insuffisances de la puissance publique puisse ainsi être «remerciée» en se voyant soustraire cette gestion. Outre le fait que la puissance publique ne puisse déposséder l’association de cette ligne dont elle est détentrice sans soulever des questions juridiques, il convient d’imaginer l’impact de cette décision pour cette association du fait de son implication historique.

En outre, une telle mise en concurrence insinue, à terme, une remise en question de ses voies de financement, et par là même l’existence de cette association qui a fait de la lutte contre les violences faites aux femmes sa raison d’être. Cette menace sur sa survivance se ferait au profit d’un prestataire dont le degré d’engagement et d’expérience sur cette problématique particulière n’est nullement acquis.

Explosion des appels pendant les périodes de confinement

En effet, la FNSF présente un fort degré de connexion avec les associations de prise en charge et prodigue une écoute particulièrement qualitative grâce à trente ans de pratique. Cette expérience et l’implication de ces bénévoles et professionnels engagés sont irremplaçables et le transfert potentiel de cette mission vers un prestataire nouvellement venu représenterait une perte inenvisageable pour l’unique service d’écoute en ligne pour les violences faites aux femmes.

Ainsi, forte de ses liens avec 73 associations, la FNSF a pu mobiliser ce réseau pour répondre efficacement à l’explosion des appels pendant les périodes de confinement.

Enfin, que la puissance publique puisse s’arroger ainsi ce service nous alarme sur la possibilité de la mise en concurrence de l’ensemble des lignes d’écoute nationales avec l’impact que cela pourrait avoir sur la qualité des activités.

Places non mixtes

Nous demandons à madame la ministre chargée de l’Egalité entre les femmes et les hommes, Elisabeth Moreno, de revenir sur le lancement de ce marché public qui aboutirait à une baisse de qualité dans la gestion de la ligne téléphonique 3919 et d’assurer la continuité de sa gestion par l’association FNSF, par le biais d’un renouvellement de contrat pluriannuel d’objectifs et de moyens.

Par ailleurs, parmi les 1 000 places créées en hébergement d’urgence pour les femmes victimes de violence – et alors que le nombre demeure bien insuffisant –, aucune n’a été attribuée aux associations spécialisées dans la lutte contre les violences faites aux femmes. Le montant attribué par place est d’ailleurs si faible qu’il ne peut inclure un suivi social ou psychologique en plus de l’hébergement. Qui plus est, toutes ces nouvelles places se trouvent dans des établissements mixtes alors que l’attribution de places non mixtes est une demande récurrente pour que les femmes se rétablissent mieux de leurs traumatismes.

A l’aune de ces remarques qui ne sont nullement exhaustives, il s’avère que les buts et objectifs poursuivis dans la lutte contre les violences faites aux femmes semblent avoir été particulièrement manqués dans leur traitement par la majorité gouvernementale.

Signataires

Monde culturel et associatif

Mathilde Larrère historienne, Giulia Foïs journaliste et autrice, Camille Froidevaux-Metterie philosophe féministe, les Chiennes de garde, le Collectif national pour les droits des femmes.

Personnalités politiques

Bénédicte Taurine députée LFI, Manon Aubry eurodéputée LFI, Clémentine Autain députée Ensemble !, Ugo Bernalicis député LFI, Manuel Bompard eurodéputé LFI, Marie-Georges Buffet députée PCF, Clémence Guetté co-responsable de l’espace programme LFI, Sophie Camard maire Gauche républicaine et socialiste (GRS) du Ier secteur de Marseille, André Chassaigne député et président du groupe Groupe de la Gauche démocrate et républicaine (GDR), Leila Chaibi eurodéputée LFI, Eric Coquerel député LFI, Alexis Corbière député LFI, Catherine Coutard conseillère régionale GRS en Auvergne-Rhône-Alpes, Pierre Dharréville député PCF, Elsa Faucillon députée PCF, Caroline Fiat députée GRS-LFI, Sébastien Jumel député PCF, Michel Larive député LFI, Karine Lebon députée Pour La Réunion (PLR), Marie-Noëlle Lienemann sénatrice et coordinatrice nationale de GRS, Myriam Martin conseillère régionale LFI en Occitanie, Emmanuel Maurel eurodéputé et animateur national de GRS, Jean-Luc Mélenchon député et président du groupe LFI, Sabrina Nouri animatrice du livret Egalité femmes-hommes à LFI, Danielle Obono députée LFI, Younous Omarjee eurodéputé LFI, Adrien Quatennens député et coordinateur national de LFI, Mathilde Panot députée LFI, Anne-Sophie Pelletier eurodéputée LFI, Loïc Prudhomme député LFI, Sandra Regol secrétaire nationale adjointe d’EE-LV, Raphaëlle Rémy-Leleu conseillère de Paris et porte-parole d’EE-LV Ile-de-France, Rosalie Salaün co-responsable de la commission féminisme d’EE-LV, Muriel Ressiguier députée LFI, Sandrine Rousseau enseignante-chercheuse et membre d’EE-LV, Fabien Roussel député et secrétaire national du PCF, Sabine Rubin députée LFI, François Ruffin député LFI, Gabriel Serville député GDR, Jean-Christophe Sellin conseiller régional LFI en Occitanie, Guilhem Serieys conseiller régional LFI en Occitanie, Sophie Taillé-Polian sénatrice et coordinatrice nationale de Génération·s, 
Hadhoum Tunc conseillère départementale GRS dans la Marne.

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