Souveraineté industrielle

Une nouvelle politique industrielle, vraiment !

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Ne boudons pas notre plaisir lorsqu’aboutit l’installation de nouvelles usines, de nouvelles productions industrielles en France, et en particulier dans cette région du Nord-Pas-de-Calais qui a tant souffert des délocalisations de la désindustrialisation.

Alors oui, réjouissons-nous de l’implantation à Douai de cette nouvelle usine de batteries par le sino-japonais Envision. Néanmoins il est important de penser à l’avenir et de veiller à ce que ces investissements soient durablement ancrés dans notre territoire et permettent une souveraineté technologique retrouvée. Partenariat avec des entreprises étrangères très bien, mais garanties sur l’indépendance de la France et réindustrialisation en profondeur indispensables !

Ne laissons pas sans réponse la question du remboursement des aides publiques en cas de départ, car cela reste un moyen d’éviter les stratégies opportunistes de court terme. Il est fort probable qu’au regard de l’investissement dans cette usine, il n’y ait pas de départ dans un temps court ou moyen. Mais qui peut le dire durablement ? En tout cas, ce devrait être une méthode systématique, une affaire de principes et d’une certaine dissuasion.

En tout cas, le soutien des pouvoirs publics à l’entreprise ACC, elle-même engagée dans cette production, dont les capitaux sont français et qui doit s’installer tout près à Douvrin est essentiel. Car nous n’avons pas intérêt à ne dépendre que d’une production, notamment pour suivre et même anticiper les innovations technologiques qui vont se poursuivre dans ce secteur. Cela peut d’ailleurs consolider, dans cette région, un écosystème « batteries » qui crée des synergies et des emplois.

Attention cependant à l’arbre qui cache la forêt ! Une hirondelle ne fait pas le printemps…

Notre réindustrialisation ne saurait être fondée sur quelques secteurs, ce qui la rendrait fragile, mais se diffuser dans de nombreuses filières.

Or tous les jours des usines ferment car on les laisse fermer. Elles ferment souvent pour des raisons de pure valorisation financière, avec des délocalisations à la clef, et parfois aussi faute d’investissements et de stratégie de mutation tant technologique que des produits réalisés. Sans compter que les prédations par des fonds financiers étrangers continuent à faire des ravages.

Le gouvernement n’a pas encore engagé des stratégies offensives de filières dans certains domaines clés comme les médicaments, la santé, le matériel médical. Dans le cadre de la rencontre « choose France » seront annoncés des milliards d’investissements étrangers en France. Si le laboratoire Merck devrait investir 175 millions d’euros pour transformer ou consolider ses deux sites de Molsheim et de Martillac, en revanche Sanofi continue à réduire sa voilure et à installer aux États-Unis des laboratoires de recherche actuellement en France et refuse toujours d’engager une relocalisation de productions des médicaments majeurs dans notre pays.

Je n’épiloguerai pas sur le fait que dans ce grand show sur les investissements étrangers en France, on comptera des grands entrepôts pour le e-commerce, comme celui de Zalando en région parisienne ; il est loin d’être sûr que cela favorise le commerce local et la production nationale.

Protégeons vite nos ETI ! Développons l’Intelligence économique !

Le quotidien Les Échos souligne qu’une récente enquête, auprès des dirigeants des ETI françaises, montre qu’ils sont manifestement confiants dans l’avenir de leur entreprise. Un tiers d’entre eux ont été contactés pour le rachat ou une entrée au capital par des sociétés non cotée (majoritairement étrangères) mais surtout par des fonds d’investissements qui possèdent d’importantes liquidités. Le risque de prédation est important et il faut une mobilisation et un suivi rapproché de ces entreprises, notamment avec des outils publics (BPI, mobilisation de l’épargne des Français) permettant de leur offrir les financements nécessaires à leur développement.

C’est un des aspects du programme national d’intelligence économique qu’il faudrait mettre en place, en liens étroits avec les territoires, les chefs d’entreprises et les syndicalistes pour prévenir les risques et mesurer les opportunités ! Je ne reprendrai pas ici mon argumentation en faveur de la proposition de loi, que j’ai déposée, en faveur d’une stratégie nationale d’intelligence économique et qu’il serait urgent de voter…

J’insiste sur l’importance d’un contact étroit avec les syndicalistes qui voient souvent les premiers ce qui se trame et pourrait menacer leurs entreprises et qui sont particulièrement motivés par l’emploi local.

Vite conjurer la carence majeure de la politique gouvernementale en matière de recherche et d’innovation.

Les rapports se multiplient pour montrer le déclin de la recherche française, et singulièrement de la recherche scientifique, hélas engagée depuis de très nombreuses années, au moins depuis Sarkozy, mais poursuivie sous Hollande puis Macron. Les chercheurs n’ont cessé d’alerter sur les graves conséquences, non seulement le manque tragique de moyens (notre part de PIB très faible par rapport aux autres nations développées), la précarité croissante des chercheurs et cette folie permanente des appels à projets qui démembre la colonne vertébrale de la recherche – indispensable à son efficacité, à sa capacité à allier solidité dans la durée et réactivité face aux évolutions –, les insuffisantes perspectives pour les doctorants, etc.

Si le crédit impôt recherche se justifie dans le secteur industriel pour les nouvelles technologies, il est trop souvent utilisé dans des secteurs qui n’en ont pas besoin (comme le secteur bancaire) et sans condition de maintien des laboratoires de recherche, par exemple. En résumé, il coûte cher, n’est pas assez ciblé et n’est soumis à aucune condition sérieuse. Il y a ici un grave gaspillage de l’argent public qui pourrait être utilisé à meilleur escient pour la recherche.

Tout cela nous n’avons cessé de le répéter pendant le débat parlementaire sur la loi de programmation pour la recherche. Mais c’est toujours la prétention technocratique qui prévaut, contre l’avis de celles et ceux qui font vivre la recherche, portent des visions et des projets, tout autant que domine ce mimétisme à l’égard des Anglo-saxons sans se doter de leurs moyens et sans tenir compte de notre culture. Les chercheurs brillants sont là (il suffit de voir les prix Nobel, reconnaissance de leurs pairs) mais ils ne sont ni valorisés, ni soutenus suffisamment dans leurs recherches, au point que certains doivent partir à l’étranger pour les réaliser !

Tout cela est très dangereux et il faut faire du redressement de la recherche française une priorité du débat présidentiel pour changer de cap.

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