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Rentrée universitaire : il faut un effort massif pour réparer notre enseignement supérieur

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Universités et étudiants : la crise était déjà là avant la pandémie. Elle s’est aggravée avec le Covid… Un avenir inquiétant si rien ne change !

Qu’a fait Frédérique Vidal, ministre de l’enseignement supérieur, depuis sa prise de fonction en juin 2017 ? L’université française était déjà en difficulté : des amphis et des TD surchargés, une progression d’année en année universitaire proche du darwinisme pour les étudiants, une recherche sous financée, une politique du logement insuffisante, une précarité croissante du monde étudiant, le salariat devenu largement majoritaire mettant de plus en plus en péril la réussite de leurs études…

Un bilan défavorable

L’action des gouvernements Macron a aggravé cette situation : la réforme de « Parcours Supp » a rendu encore plus injuste, aléatoire et in fine angoissante les défaillances de l’orientation et de l’inscription à l’université… En matière de logement étudiant, la situation est catastrophique : dès octobre 2017, la baisse des APL de 5€ a été désastreuse avec des effets cumulés les années suivantes ; en janvier 2021, l’entrée en vigueur contemporanéité des APL les a aggravés ; sur les 60 000 logements étudiants promis par Emmanuel Macron en 2017, seuls 16 327 logements effectivement construits (il en résulte une baisse du pourcentage d’étudiants en résidence universitaire – 7% en 2017, 6,25% pour la rentrée 2021). Depuis 2007, le quinquennat Macron est le seul sous lequel les étudiants ont perdu de l’argent en aide directe.
Si les budgets de l’enseignement supérieur sont restés nominalement à la hausse (engagée en 2012) en 2018 et 2019, une baisse du schéma d’emplois de la Mission interministrérielle de la recherche et de l’enseignement supérieur et de ses opérateurs était engagée dès le budget 2019. La situation financière des universités étaient devenues particulièrement difficile en 2018-2019. Et pour l’exercice en cours, une fois l’inflation soustraite, le budget de l’enseignement supérieur et de la recherche baisse de près de 100 M€. On voit à quel point sonnent creux ses affirmations lors de l’examen de sa LPPR, adoptée au forceps fin 2020 mais décriée tant sur les bancs du parlement que par tous les acteurs de la Recherche !

Le monde universitaire devra encore se débrouiller après 18 mois de crise sanitaire

Ainsi lorsque Frédérique Vidal a annoncé très satisfaite une « rentrée la plus normale possible », « 100 % présentiel », il y a loin de la coupe aux lèvres… Car en réalité, la circulaire ministérielle du 5 août entretient volontairement le flou sur les moyens à mettre en œuvre pour y arriver.
Chacun voudrait croire que le « retour à la normale » est possible, mais les moyens ne sont pas au rendez-vous. Or la « terrible année 2020-2021 » avait elle aussi commencé par l’espérance d’un retour à la normale, avant que la situation sanitaire ne s’assombrisse à l’automne, puis, semaine après semaine, visio après visio, qu’elle ne vienne alimenter la déprime des étudiants, le sentiment d’usure des enseignants et transforme les facs en désert. Les dégâts à rattraper sont aussi pour la recherche, au ralenti depuis deux ans. La crise a aussi mis un coup de frein aux coopérations universitaires. La crise a aussi obligé les enseignants à se renouveler pédagogiquement, notamment pour dynamiser les cours magistraux, accélérant une évolution latente, qui perdurera sans doute. Ce renouvellement pédagogique est d’autant plus important qu’il faudra s’adapter aux jeunes qui arrivent sur les bancs de la fac après avoir étrenné les réformes du lycée et du bac dans ce contexte de crise sanitaire et remettre à niveau ceux des années supérieures, car les étudiants qui entrent en 3ème année de licence n’ont jamais connu une année normale.
En 18 mois de crise sanitaire, celle-ci a terriblement accru la paupérisation d’une partie de la jeunesse étudiante, faisant apparaître de nouvelles inégalités : 82% des étudiants ayant un emploi rémunéré ont déclaré connaître des difficultés financières depuis mars 2020 en lien direct avec la crise sanitaire ; 58% de ceux qui exerçaient une activité ont arrêté, réduit ou changé leur activité rémunérée. Dans ces conditions, les inégalités d’accès au numérique (matériels informatiques, accès au réseau internet, etc.) ont pesé encore plus lourd dans la réussite ou l’échec des études. Pire, le coût de la vie étudiante a encore augmenté en 2021 : +2,5% (+10,72% sur l’ensemble du quinquennat). Une part non négligeable résulte de l’augmentation du coût du logement tant en province que dans la banlieue parisienne, qui représente le premier poste de dépense (60% du budget d’un étudiant). Et l’exécutif vient de supprimer les repas à 1€ pour les non-boursiers.

Il est donc impératif de prendre un certain nombre de mesures d’urgence :

  • Un plan massif de réduction de la précarité étudiante, qui soustrait au maximum les étudiants au salariat qui handicape leurs études, en mettant en place une réforme des bourses puis très vite l’allocation d’autonomie réclamée depuis des années par les organisations étudiantes ;
  • Un plan massif d’équipement des locaux universitaires avec des capteurs de CO2 et des purificateurs d’air ;
  • Un dispositif permanent d’information, de sensibilisation et d’accès sans RDV à la vaccination, dans tous les sites universitaires pour les étudiants qui ne seraient pas encore vaccinés contre le COVID 19 ;
  • Une mise à disposition de locaux supplémentaire permettant notamment de dédoubler les classes de TD ;
  • Publication d’une nouvelle circulaire donnant enfin un encadrement national à l’organisation des examens ;
  • Ajournement immédiat des effets des réformes successives des APL en direction des étudiants ;
  • Un plan de remise à niveau budgétaire des universités françaises, prenant en compte le renforcement des filières scientifiques, la valorisation des doctorants et docteurs ;
  • Un plan de recrutement d’enseignants dans de nombreuses disciplines qui en manquent aujourd’hui, accompagné d’une amélioration des conditions de travail et de rémunération des vacataires ;
  • Révision de la loi de programmation de la recherche pour permettre une revalorisation des chercheurs et de leur capacités de recherche.

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