Numérique

Marchés publics et Logiciels – question écrite au gouvernement, 27 janvier 2017

Partager sur facebook
Partager sur twitter
Partager sur linkedin

Mme Marie-Noëlle Lienemann attire l’attention de Mme la secrétaire d’État, auprès du ministre de l’économie et des finances, chargée du numérique et de l’innovation sur les marchés publics pour les logiciels.

En dehors du cadre des logiciels libres ou des standards ouverts, la gratuité des logiciels, formations ou services qui sont proposés au grand public se traduit nécessairement par des avantages indirects pour les entreprises qui les proposent. La contrepartie du courriel gratuit tient dans l’accès aux données personnelles des usagers. La contrepartie d’un site web gratuit correspond à l’affichage de publicités pour ses visiteurs. Un logiciel qui est offert permet de bénéficier de plus de retours des usagers pour l’améliorer, et aide à imposer les technologies qu’il utilise sur le marché – au détriment de ses concurrents. Mais ce qui relève du choix des usagers d’accepter ou de refuser individuellement les contreparties de cette gratuité ne saurait être accepté par l’État sans lourdes conséquences sur l’état du marché, de la concurrence, et finalement sur le public lui-même. En laissant un acteur du marché offrir gratuitement ses produits ou ses services à l’État, la contrepartie est évidemment de les imposer au grand public qui en aura pris l’habitude – le risque étant démultiplié dans certains secteurs sensibles comme l’éducation où cette fourniture gratuite de produits et services aboutira à former et formater des millions d’enfants à leur usage à un âge où ils auraient au contraire besoin de comprendre qu’il existe une grande diversité de possibilités.

Ces situations sont normalement contrôlées par le droit des marchés publics qui interdit que l’État accepte des produits ou des services gratuits en contrepartie d’avantages indirects pour les entreprises. L’objectif est à la fois de protéger l’égalité de traitement face aux marchés publics, mais aussi d’éviter le développement de pratiques qui peuvent rapidement relever du favoritisme ou de la corruption.
Ce contrôle permet également de s’assurer que les produits ou services qui sont fournis correspondent exactement au besoin initial de l’État et que la solution proposée soit la mieux adaptée.
Malgré cette interdiction, différentes administrations, dont notamment le ministère de l’éducation, ont insisté pour accepter des conventions de ce type.

Bien que cette pratique nouvelle soit contradictoire avec l’ensemble des règles gouvernant les marchés publics en France et en Europe, bien qu’elle favorise des entreprises dont les pratiques fiscales aient pu justifier d’importants redressements, bien qu’elle vise des produits ou des services dont les fournisseurs aient pu déjà être condamnées par les autorités de concurrence françaises et européennes, le ministère a tenu à passer outre en prétextant d’une volonté de pragmatisme et d’économie.

Elle avait déposé avec plusieurs de ses collègue sénateurs en avril 2016 un amendement à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016 pour une République numérique qui visait à interdire clairement cette pratique qui semble se développer, et à l’interdire nettement. À défaut il faudrait admettre que des entreprises peuvent faire du dumping sur le marché en proposant leurs produits et services gratuitement à l’État, et accepter toutes les dérives que cela peut représenter en termes d’avantages indirects, de corruption et de dégradation du service public.
Elle lui demande donc ce que compte faire le Gouvernement pour éviter les dérives décrites ci-dessus.

LES DERNIERS ARTICLES