De bonnes nouvelles qui ne dispensent en rien de l’arrêt des politiques d’austérité et d’une réorientation majeure de l’UE

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Mario_Draghi_22-01-2015Ce serait une grande erreur que de continuer à penser que les améliorations viendront de l’extérieur, de la conjoncture mondiale et qu’il suffit d’être patient. La situation de l’emploi, qui est, à l’évidence, l’enjeu majeur, ne s’améliorera pas sans une nouvelle politique européenne et, en France, sans un plan de relance qui s’exonère des dogmes des politiques austéritaires.

Car regardons les évolutions en cours, les récentes décisions pour évaluer leur réelle portée et les conséquences pour la France et les Français.

Si des signes positifs sont indéniables, leur traduction en amélioration de l’économie, des conditions de vie et un recul du chômage est plus qu’hypothétique.

Partons d’abord de faits internationaux à savoir la baisse du prix du pétrole et celle de l’Euro. La concomitance de ces deux bonnes nouvelles va créer un effet croissance, tant par l’impact sur le pouvoir d’achat des ménages que par l’aide que cela apporte à nos exportations. Sur ce dernier point, l’effet sera surtout observé dans les échanges en dollar ou avec cette zone commerciale, mais avec les autres partenaires commerciaux (Russie, Chine, Asie, Afrique, etc.) c’est hélas moins vrai, car leurs monnaies se sont, elles aussi, abaissées ; donc la parité avec l’euro n’a guère changé et, s’agissant du rouble, même détériorée.

Ce sera bon pour notre balance commerciale car, dans le même temps notre facture pétrolière, va s’alléger. Mais n’oublions jamais qu’une très large part de nos exportations s’effectue dans la zone euro et, là, si nous n’imposons pas des convergences sociales vers le haut et une harmonisation fiscale, nous continuerons à subir les effets négatifs de cette concurrence à bas coût.

Reste qu’en dépit de ces bonnes nouvelles, le FMI, l’OCDE et d’autres instituts prévoient une croissance au mieux à 1 %, ce qui est très loin du seuil permettant, en l’état, de réduire la chômage. Hélas.

On observe la même tendance dans toute l’Union Européenne où les politiques des restrictions budgétaires et de compression salariale étouffent toutes les chances de relance créée pas cette bouffée d’oxygène, que sont la baisse de l’euro et la baisse du prix du pétrole.

La décision de la BCE de racheter des dettes souveraines est aussi une bonne nouvelle.

C’est cependant vraiment très tardif et il aurait fallu faire cela dès le début de la crise et même stratégiquement remettre en cause ce dogme du prêt aux États par les banques et établissements financiers, plutôt que directement par les Banque centrale comme nous le demandons depuis très longtemps.

Il est quand même scandaleux d’observer qu’une très large partie de nos dettes sont des intérêts versés aux banques, qui elles-mêmes empruntent aux banques centrales. Mais les Allemands s’y sont toujours opposé, la France et d’autres se sont alignés. Mais, là, au pied du mur il fallait agir et le patron de la BCE a entraîné ses collègues sur ces rachats de grande ampleur. Ils ne seront pas éternels mais cette mesure devrait accélérer la chute de l’euro et le mettre pendant toute cette période de plus d’un an à un niveau bas. Cela ne se limitera pas cette fois-ci à la parité avec le Dollar.

Le point faible du dispositif est l’absence de solidarité puisque, à la demande de l’Allemagne, ce sont chacune des banques nationales qui rachèteront les actifs de leurs pays. Évidemment, c’est gênant pour les petits pays, ceux du Sud en particulier. Mais, de ce côté là, c’est plutôt favorable à la France. L’autre limite est que cette nouvelle capacité à agir est conjoncturelle, au regard de l’ampleur de risques, mais n’est pas structurelle comme nous le souhaitons.

Au passage, j’ai toujours fait observer que, dans l’histoire, les pays ne sont jamais sortis d’un fort endettement qu’avec la seule politique monétaire. Il va falloir suivre l’impact de tout cela. Mais cela ne suffira pas à provoquer une relance suffisante.

On peut partager le diagnostic de Mario Draghi. Il relève que ces mesures ne sont pas à elles seules suffisantes et que l’amélioration du crédit aux entreprises n’aura d’effet que si la demande est au rendez-vous. Au passage, ces décisions sont très éloignées de l’ode à la politique de l’offre. Et cela est en phase avec ce que nous disons depuis des lustres.

Il faut un plan de relance équilibré avec des mesures pour augmenter le pouvoir d’achat et la demande, mais aussi des mesures en faveur l’investissement public et des entreprises.

Là où nous divergeons avec Mario Draghi sur les solutions, c’est en particulier lorsqu’il ajoute qu’il faut continuer la mise en œuvre des « réformes structurelles ». Les décisions de rachat de dettes massifs et cette dernière affirmation sont contradictoires. L’expérience a montré qu’à mesure où un pays mettait en œuvre ces « réformes » qui détricotent les droits des travailleurs, notre modèle social flexibilise, précarise, les salaires et les revenus des plus pauvres baissent, le chômage augmente et la demande par la consommation est insuffisante. Du côté des investissement, la baisse drastique des budgets publics réduit le carnet de commande des entreprises. La demande est étouffée.

Enfin, la relance aurait pu venir du plan Juncker. Or, celui-ci est non seulement insuffisant et inefficient, comme je l’ai déjà montré sur ce blog.

Il est donc essentiel de ne pas s’endormir au vu d’un frémissement, de se rassurer avec la méthode Coué. C’est bien un changement de cap qui s’impose en Europe et en France.

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