Congrès HLM

«François Hollande mène la même politique de logement que Nicolas Sarkozy»

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Bruno Rieth

Ce jeudi, François Hollande clôturera le 76ème congrès de l’Union sociale pour l’habitat. Dans une lettre rendue publique, Marie-Noëlle Lienemann, sénatrice socialiste et animatrice du mouvement des «frondeurs» interpelle le Président de la République sur sa politique en matière de logement social. Elle y accuse François Hollande de s’inspirer en ce domaine de son « prédécesseur ».

Sarkozy_HollandeMarianne : Pourquoi avoir décidé d’écrire au Président de la République ?
Marie-Noëlle Lienemann : François Hollande a prévu de venir clôturer les travaux du congrès HLM de Montpellier. En tant qu’ancienne ministre du Logement et vice-présidente de l’union sociale pour l’Habitat, j’ai voulu . En 2012, lors de sa campagne présidentielle, il avait pris un certain nombre d’engagements, ni trop ambitieux, ni trop faibles, dont celui de produire 150.000 logements locatifs sociaux par an.  A ce jour, cette promesse n’est pas tenue. Avec un foncier de plus en plus cher, il faut impérativement avoir les crédits pour boucler les opérations. Pour donner un chiffre, en 2014, nous en sommes à 113.000 logements déclarés, encore loin de l’objectif. Et ce chiffre est à nuancer : il y a une différence entre le nombre de logements financés et ceux qui seront réalisés. Avec la démolition et la vente des logements sociaux anciens notamment pour dégager des fonds propres, le bilan global annuel de production de logements dépasse à peine les 60.000 par an. Comme il y a de surcroît  de moins en moins d’aides à la pierre depuis que François Hollande est président -c’était un mouvement déjà bien engagé sous Nicolas Sarkozy- nous sommes dans une situation où le logement lorsqu’il est construit est trop cher, en total décalage par rapport aux moyens dont disposent les Français qui aspirent au logement social. Rappelons qu’à ce jour, 50 % des locataires HLM sont en dessous du seuil de pauvreté !

Dans votre lettre vous écrivez que tout cela a un air de  «déjà vu». Est-ce à dire que la politique de François Hollande est la même que celle Nicolas Sarkozy sur ce dossier ?
François Hollande est prisonnier de la technocratie de Bercy qui défend une politique qu’elle essaye de vendre à tous les gouvernements. C’est d’ailleurs la raison de mon interpellation : il est encore temps de rectifier le tir. Bercy a en tête la suppression des aides à la pierre et leur remplacement par un prélèvement sur les organismes HLM. Cette année, le gouvernement a récupéré 120 millions d’euros sur la caisse de garantie du logement social financé uniquement par les cotisations des organismes des HLM pour les réinjecter dans les aides à la pierre. C’est pourquoi je dis qu’il y a un air de «déjà vu» puisque Benoist Apparu, lorsqu’il était ministre chargé du Logement dans le gouvernement Fillon, avait fait exactement la même chose. Ce système, philosophiquement, revient à dire que ce sont les locataires HLM, les pauvres donc, qui doivent financer les futures constructions de logements sociaux en sortant du principe de la solidarité nationale.

Ce que vous proposez peut-il s’inscrire dans une politique de réduction des déficits budgétaires ?
Oui, bien sûr ! L’actuelle aide à la pierre représente aujourd’hui 400 millions d’euros. Dans les nouvelles dispositions de la loi Macron, il y a le doublement des avantages fiscaux accordés aux cadres pour les actions gratuites et des nouveaux avantages qui sont donnés à ce qu’on appelle les impatriés, c’est à dire des Français qui reviennent travailler en France. Toutes ces mesures sont estimées à plus de 400 millions d’euros justement. Donc ce n’est pas une question de rigueur mais une question de choix. Je prétend aujourd’hui que la compétitivité, l’emploi et les valeurs républicaines seraient mieux défendues en mettant ces millions dans l’aide à la pierre plutôt que dans les avantages concédés aux cadres des grandes multinationales qui ne rendent pas le pays plus compétitif. Il faut bien se rendre compte que soutenir la construction de logements sociaux, ce n’est pas que de la dépense.  Ça donne aussi de l’emploi, ça fait vivre le secteur du BTP, ça améliore le niveau de loyer donc le pouvoir d’achat des français. Donc c’est une mesure qui aurait une efficacité économique doublée d’une efficacité sociale. Il y a des marges de manœuvres même dans le cadre des politiques de réduction du déficit budgétaire en faisant des choix plus cohérents du point de vue social et du point de vue économique.

Que pensez-vous de l’initiative de Jean-Christophe Cambadélis d’organiser un grand «référendum sur l’unité de la gauche» ?
Je ne bouderai jamais une démarche qui pousse à l’unité des forces de gauche. Il faut que ce référendum soit incontestable dans ses résultats et d’une grande transparence. Or, pour l’instant, je ne sais pas comment il est organisé. Je suis aussi très lucide sur les raisons qui amènent à ce que l’unité soit si difficile.

N’y-a-t-il pas un risque pour que ce référendum soit interprété comme une simple manipulation visant à imposer l’idée que «l’unité de la gauche d’accord, mais derrière le PS…»
Tout l’enjeu est de voir qu’elles seront les questions posées. Mais il faut rappeler au peuple de gauche que face à la menace de voir passer des régions au Front National, il faut faire des efforts. Que ce soit du côté du PS que de ses partenaires ce qui nécessite que ces derniers disent clairement ce qu’ils veulent du PS. Le dialogue est d’autant plus nécessaire…

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