LPPR

Lettre à toutes celles et tous ceux qui luttent contre la LPPR

Partager sur facebook
Partager sur twitter
Partager sur linkedin

Chère madame, cher Monsieur,
La loi de programmation de la recherche a fait l’objet de vifs débats au Sénat. J’y ai pris une part active au côté de mes collègues du groupe CRCE Pierre Ouzoulias et Céline Brulin. Nous avons déposé de nombreux amendements et voté contre le texte final.
Tout d’abord nous avons dénoncé la faiblesse des financements réellement assurés pour la recherche publique car derrière le chiffre de 20 milliards répété à l’envie par le gouvernement, se cache un étalement sur 10 ans de cette somme et qui plus est, avec une programmation surtout prévue à la fin de cette durée.
Ainsi tout ceci est d’autant plus aléatoire que s’applique l’annualité budgétaire, donc une inscription devra être votée à nouveau lors de chaque loi de finance. Qu’en sera-t-il dans 10 ans ? Non seulement nous n’atteindrons pas d’ici 10 ans les 1% du PIB consacrée à la recherche publique (ni les 3% pour l’ensemble de la recherche) et creuserons les retards accumulés depuis trop d’années avec nos voisins européens. Le raccourcissement des délais à 7 ans par le sénat pour meilleur qu’il soit ne règle pas les problèmes. En effet, l’échelonnement des crédits prévoit les hausses potentielles en fin de cycle tandis que ceux dégagés les premières années sont très faibles. Nous ne pouvons cautionner ce tour de passe-passe qui laisse la recherche dans des difficultés majeures. D’ailleurs l’inscription budgétaire pour 2021 est inférieure à la trajectoire prévue dans la loi. L’argument de sommes supplémentaires dans le plan de relance ne tient pas ! D’une part ce sont des crédits non pérennes qui ne seront pas reportés les années suivantes, d’autre part il ne s’agit pas de relance mais d’une présentation n’ayant qu’une visée de communication ! Un plan de relance digne de ce nom méritait des crédits en sus. Ce n’est pas le cas.
La seconde raison est le développement de la précarité des chercheurs et les financements massivement distribués à partir des appels à projets. Si ces derniers peuvent avoir leur intérêt ; ils ne sauraient se substituer à un haut niveau de financement permanent des laboratoires. Sans cette armature consolidée nous allons vers de terribles reculs dans bien des domaines de recherches ou la pérennité et la diversité des champs exploré sont seuls garants de résultats importants. Le gouvernement passe son temps à parler de conjurer la perte d’attractivité de la recherche française mais si la précarité se poursuit voire s’amplifie et si les financements des laboratoires ne sont pas suffisants et pérennes, cela n’aura pas lieu. Au contraire.
Enfin et c’était plus inattendu, une remise en cause des libertés universitaires a été engagée par un amendement de la droite sénatoriale auquel la ministre Vidal et le gouvernement ont donné un avis favorable. Il a été voté (évidemment j’ai voté contre et nous avons en vain alerté sur la gravité de ce choix). Cet amendement ouvre la voie à des recrutements directement par les universités et non à travers le CNU. La CMP a hélas confirmé cette disposition très inquiétante.
C’est un basculement accéléré vers un modèle libéral et anglo-saxon qui s’organise à travers cette loi alors que le modèle dit « à la française » avait fait les preuves de son rayonnement, de sa qualité scientifique quand la nation lui en donnait les moyens.
Soyez convaincus, que nous ne lâcherons pas la pression. Bien sûr nous voterons contre le texte issu de la Commission Mixte Paritaire et travaillons à une saisine du conseil constitutionnel.
Et dès le débat sur la loi de finances nous reprendrons l’offensive parlementaire.

Marie-Noëlle Lienemann
Sénatrice Gauche Républicaine et Socialiste de Paris
Ancienne ministre

LES DERNIERS ARTICLES