Mme Marie-Noëlle Lienemann interpelle Monsieur le ministre délégué auprès du ministre de l’Économie, des Finances et de la Relance chargé des comptes publics sur la fraude fiscale de certaines banques dévoilée par les « CumEx Files ».
Cette enquête revient sur une pratique nommée « CumEx » en termes financiers, qui vise à faire éviter la fiscalité sur les dividendes dont sont redevables, en France, les détenteurs étrangers d’actions de groupes français cotés en Bourse.
La technique consiste à ne plus être détenteur des titres au moment du prélèvement de la taxe et de le redevenir après. Une sorte de cavalerie financière à l’envers. Cette pratique ne peut se réaliser qu’avec la complicité consciente d’une banque qui accepte de garantir la propriété le temps de la « non détention ». Dans les faits, contre une commission de portage, la Banque se déclare intermédiaire financier et n’étant pas détentrice n’est pas redevable de la taxe. Ainsi personne n’étant détenteur des titres selon les règles fiscales, personne ne paie la taxe à l’État. A cette pratique de « CumEx » s’ajoute une autre celle du « CumCum » qui consiste à faire des ventes rapides en aller-retour. Si cette technique est, en soi légale : il est autorisé de vendre et de racheter les mêmes titres peu de temps à près leur vente. Le faire dans un but d’évasion fiscale devrait être lui, clairement illégal.
Nous sommes donc face à une organisation de fraudeurs fiscaux à grande échelle au détriment des États. Selon l’estimation mise à jour, en 20 ans, cette fraude atteindrait 140 milliards d’euros au détriment d’une dizaine de pays européens. La France serait victime d’une fraude d’un montant de 33 milliards. Quatre banques françaises auraient eu recours à cette technique d’arbitrage de dividende-autre terme utilisé pour qualifier cette fraude.
Dès 2020, le gouvernement finlandais a rendu illégale cette pratique et a diligenté des enquêtes. En juillet 2021, l’Allemagne a pris des décisions de même nature. Les États-Unis ont déjà infligé plus de 400 millions de dollars d’amendes à quinze établissements financiers entre 2017 et 2020. Il est donc démontré par les actions de ces pays qu’il est possible de lutter contre cette technique de fraude.
Marie-Noelle Lienemann s’étonne de l’absence immédiate de réaction du gouvernement et cette situation perdure de façon incompréhensible.
Le gouvernement français peut agir de deux façons. La première serait, à l’instar de la Finlande, de l’Allemagne ou des États-Unis de rendre illégale la technique du « CumCum ». Cela aurait le double avantage de lutter contre la dimension de fraude fiscale de cette pratique mais aussi de stabiliser, un temps, l’actionnariat pendant un temps minimal de détention qui serait rendu obligatoire. La seconde concerne les montages, dits « externes ». Ils sont fondés sur les avantages fiscaux octroyés par la France aux ressortissants de pays étrangers. Les conventions fiscales avec certains pays (Qatar, Arabie saoudite par ex.) ont ouvert des opportunités importantes de « CumEx » en taxant les dividendes à 0%. Une modification de ces conventions en particulier sur le temps de détention des titres serait un moyen efficace de lutte contre cette évasion.
Mme Lienemann demande donc au ministre ce que le gouvernement entend mettre en place pour lutter contre cette évasion fiscale d’une part mais aussi s’il entend diligenter des enquêtes afin de déterminer la responsabilité ou non d’acteurs financiers français d’autre part.