L’Europe et la démocratie ne font pas bon ménage. C’est très inquiétant. Reprenons la main.

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Les grandes déclarations sur nos valeurs européennes communes au premier rang dès qu’elles se trouve la démocratie, ne sont, hélas que peu suivies d’effets. Cela contribue hélas à les décrédibiliser dans nos pays et en dehors.

Chaque fois que les peuples sont consultés tout est fait pour contourner leur refus d’avaliser les politiques et choix que les prétendues élites européennes jugent décisives.

La lourde erreur du contournement du vote contre le projet de traité constitutionnel.

En France.

Les 54,68 % de vote négatif des Français sur le projet de traité constitutionnel fut suivi de la signature d’un traité (traité de Lisbonne) totalement similaire validé par l’Assemblée moins de 2 ans plus tard, au motif de la victoire de Nicolas Sarkozy qui lui aurait donné mandat en ce sens … vaste fumisterie et grave entorse au respect du vote populaire. On notera que déjà lorsque le référendum a eu lieu, une très très grande majorité du parlement était pour le oui en total décalage avec la population. Mais cela n’a manifestement pas fait réfléchir les politiques d’alors. Surtout à gauche ou 60 % des électeurs avaient voté NON et plus encore dans les couches populaires.

Une large partie du PS d’alors avait porté main forte à ce mauvais coup … comme « Paris valait bien une messe », selon eux, la construction européenne valait bien cette entorse. On ne dira jamais assez les graves conséquences de ce déni. Sur le fond, les conséquences prévisibles sont hélas confirmées : recul économique de l’Europe, désindustrialisation et appauvrissement de la France, remise en cause de notre protection sociale et nos services publics ! Sur la méthode, le mépris du peuple « ignorant » va entretenir un doute démocratique persistant.

 

Ailleurs en Europe.

Cette attitude n’a pas été l’apanage des seuls dirigeants français 

Des mécanismes comparables s’observeront aux Pays-Bas où le peuple néerlandais avait voté non au traité constitutionnel. Et au Danemark, où se profilait la victoire du NON, le référendum avait été report sine die.

 

Le péché originel du traité de Rome n’a jamais été réparé, au contraire.

 Il faut, hélas, constater à que ce déni démocratique vient de loin. Sans reprendre les propos visionnaires de PMF qui vota contre le Traité de Rome dénonçant la dépossession démocratique des peuples, contestant la construction technocratique d’un grand marché commun en lieu et place de l’Europe qu’il voulait politique et sociale et on notera que la social-démocratie européenne s’est hélas moulée dans cette erreur stratégique majeure : soutenir le marché était censé développer la démocratie qui tôt ou tard porterait le social ! Cette inversion des priorités lui fut fatale et en tout état de cause il est essentiel désormais non pas de battre sa coulpe, impuissants, mais de tirer toutes les conséquences des ces erreurs ! Hélas nous en sommes loin et on entend toujours les discours lénifiants sur « il faut plus d’Europe, plus de pouvoir aux instances européennes et moins aux Etats » Bref continuer sur la voie désastreuse actuelle.

 

Priver les citoyens européens des choix économiques stratégiques en gravant dans le marbre des traités un « pacte de stabilité » bridant la croissance et poussant à l’austérité budgétaire ! Exonérer l’économie de l’arbitrage des peuples, le rêve des libéraux fait reculer la confiance démocratique.

 

Rappelons-nous d’abord les discours pendant la crise Covid. Rien ne serait comme avant !

On aurait pu imaginer que le cadre macro-économique de l’UE serait repensé au regard des leçons à tirer des crises successives -sanitaire et ukrainienne- . Hélas la « rénovation » du pacte de stabilité actuellement discuté n’est que cosmétique et ne fait que renforcer la logique restrictive actuelle.

 

Ce carcan économique, budgétaire est quasiment intangible, inscrits dans les traités alors que dans une démocratie, d’une part les élections doivent permettre de changer de politiques économiques, d’autres part les gouvernements doivent pouvoir selon les circonstances tantôt engager des politiques de relance, tantôt s’endetter pour investir et quand la conjoncture devient meilleure réduire les déficits…

Tout cela devient quasiment impossible et le bilan des courses est cette croissance européenne nettement inférieure à celle de tous les autres sur la planète, cette absence d’investissement dans la recherche et des grands projets de technologie d’avenir, sans compter la détérioration des infrastructures et services publics.

Comment a-t-on pu en arriver là ?

Le gouvernement Juppé lors du quinquennat de Jacques Chirac donne son accord au traité d’Amsterdam. Mais arrive la dissolution et Lionel Jospin devient premier ministre. Son programme prévoyait de ne pas le ratifier en l’état. Pourtant au motif de ne pas créer une tension avec le président de la République, Lionel Jospin fera ratifier ce traité particulièrement nocif !

 

Nocif pour l’UE, car comme prévu cela a étouffé la croissance, et son PIB a très faiblement augmenté, décrochant par rapport aux USA et aux pays émergents ! cet appauvrissement pèse sur la vie des citoyens européens.

De surcroît ces dogmes économiques tendaient à consolider l’idée « Quoique vous votez, nous faisons ce que nous avons décidé »

 

Le dessaisissement des États pour les traités de libre-échange et les accords commerciaux internationaux constituent un pur scandale. La ratification par les parlements nationaux ou par référendum est quasiment supprimée sauf parfois sur quelques points !

 

En effet, depuis le traité de Lisbonne (celui accepté après le vote NON des Français) donne les pleins pouvoirs aux instances européennes pour négocier et approuver des accords commerciaux, sans ratification des parlements nationaux sauf sur certains sujets limités comme les investissements étrangers directs.

 

Qui plus est quand il reste quelques sujets qui justifient une ratification par les États nationaux, tout est fait pour s’en passer.

Le cas du CETA est hélas révélateur. Il a été signé en 2014 par la commission européenne mais seulement validées par le conseil et le parlement européen en 2017. Dés ce moment, il rentre donc en application directe. Il reste à faire ratifier le texte par les états membres puisqu’il contient quelques éléments hors du champ strictement communautaire (traité dit mixte).

Le gouvernement français sentant bien la résistance probable du parlement (tant cet accord est déséquilibré pour l’agriculture française et en particulier pour la filière déjà très en difficulté de l’élevage, mais aussi pour l’absence de clauses miroirs et des raisons écologiques plus larges concernant l’échange de produits polluants comme le pétrole issu des sables bitumineux) ne présente qu’en 2019 sa ratification à l’Assemblée Nationale. Elle n’est approuvée que de façon très serrée car la majorité pourtant confortable d’alors est divisée ! Au vu de ce résultat a le gouvernement ne présente pas le texte au Sénat (au passage on voit l’intérêt démocratique de deux chambres !).

Il aura fallu l’initiative du groupe CRCE (communiste), il y a quelques semaines en utilisant son droit de tirage (la niche parlementaire) pour imposer cet examen qui s’est conclu par un rejet du traité par la haute assemblée. La règle normale voudrait que ce texte soit inscrit maintenant rapidement à l’Assemblée pour une seconde lecture, mais le gouvernement et sa majorité relative s’y refusent sachant qu’un vote négatif y est très probable. Ils l’annoncent pour après les élections européennes. Traduisons : faisons les mauvais coups loin des possibilités de sanctions populaires. Toujours la même logique contourner en permanence la démocratie.

Le CETA s’applique pourtant à ce jour alors que seuls 17 états sur 27 l’ont ratifié !

Mais la plupart des traités de libre échange ne sont pas mixtes et comme celui avec le Chili ou la

Nouvelle Zélande récemment approuvé par le parlement européen s’applique sans vote des parlements nationaux ! Et le projet de Mercosur procède de la même logique.

Certains y voient un progrès de la supranationalité c’est en fait un recul de la démocratie tant la discordance entre les peuples et ceux qui décident à l’échelon européen devient patente et tant au nom de ce fédéralisme ce sont toujours les pays les plus forts qui font prévaloir leurs intérêts. Combien de fois a-t-on vu sacrifier l’agriculture française au profit des la machine-outil et des grosses automobiles allemandes. Mais les Français ne sont pas les seuls !

Il faut rappeler aussi qu’en cas de désaccord sur l’application de ces accords de libre-échange ce n’est pas la justice des pays qui est compétente mais des tribunaux arbitraux constitués d’experts !! Là aussi c’est accepté de sortir de l’état de droit normal.

De plus en plus de règlements européens et moins de directives qui doivent être transposées dans chaque pays. La montée en puissance de la normalisation bureaucratique.

De manière plus insidieuse et plus technique, pour se passer de la résistance de plus en plus forte des représentants nationaux et des peuples, la commission européenne dépose de moins en moins de directives et de plus en plus de règlements ! La différence : La directive approuvée par le conseil et le parlement doit être transposée dans le droit des États membres pour une application adaptée à chaque pays (ce qui laisse une certaine marge de manœuvre). Le règlement lui aussi approuvé par les instances européennes s’applique directement et de façon uniforme dans les 27 États. C’est le grand triomphe des normes et injonctions souvent bureaucratiques et souvent bien décalées du terrain. Dans tous les pays d’Europe les citoyens s’en plaignent mais cela ne fait que croître et embellir !

Ainsi dans la mandature du parlement européen qui s’achève le nombre de directives examinées a chuté par rapport à la précédente et le nombre de règlements a augmenté !

Il faut s’alarmer de l’offensive anti démocratique dans le monde où les régimes autoritaires s’imposent de plus en plus, vient en synchronisation avec un doute démocratique profond dans les pays développés et dans l’UE (taux d’abstention des couches populaires, de la jeunesse, sentiments de ne pas être écoutés ni entendus, fatalisme, discours sur il n’y a pas d’autres politiques possibles).  

 

Ne laissons plus faire, reprenons nos affaires en main en Europe et en France

Exigeons désormais que tous les traités européens (élargissement, libre échange, changement des règles et compétences) soient ratifiés en France par des référendums. 

 

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