Arrêtons les choix désastreux.
Nous payons lourdement les erreurs accumulées par les libéraux en France et en Europe.
Cela commence en 1995 quand le gouvernement Juppé, sous la présidence de Jacques Chirac, la privatisation d’Usinor. La nationalisation réalisée en 1982 avait permis de remettre sur les rails l’entreprise qui pâtissait du sous-investissement de la famille De Wendel propriétaire alors. Le groupe nationalisé avait dû faire face à de profondes réorganisations avec des douloureuses suppressions d’emplois. Il est alors le 3eme groupe sidérurgique mondial !
A l’époque, l’État récupère 17 milliards de Francs qui partirons en fumée, et cette privatisation comme la plupart de celles réalisées au moment du grand basculement libéral va ouvrir la porte à la financiarisation de notre économie, et à la désindustrialisation, tout en appauvrissant l’Etat. Dans le cas d’Usinor, cette privatisation va rendre le groupe particulièrement vulnérable lors de la fusion européenne qui va aboutir à la création d’Arcelor avec une perte d’influence française. Et plus encore lors de l’OPA hostile de Mittal qui en prendra le contrôle en 2006. Le gouvernement français se dit alors en désaccord mais les actionnaires ont le dernier mot et ne se préoccupent que de la valorisation de leurs actions !!
Déjà, déplorer ne servait à rien, il fallait ne pas laisser faire et renationaliser. Mais l’aveuglement idéologique sévit une fois de plus !
Nous avons tous en mémoire la fermeture des hauts fourneaux à Florange en 2012 et de l’absurde décision de François Hollande et de Jean-Marc Ayrault qui l’acceptent et se contentent de plans sociaux et du maintien d’activités à minima sur le site, en balayant d’un revers de main la proposition de nationalisation temporaire proposée par Arnaud Montebourg alors que d’autres repreneurs se disaient intéressés et qu’un rapport demande sur la filière acier montrait la viabilité de cette solution ! Là encore la posture est d’abord idéologique avec cette phrase stupéfiante de JM Ayrault : on ne va pas refaire les mêmes erreurs qu’en 81 ! Dramatique et pathétique ! Ce sera hélas le symbole des renoncements du quinquennat de François Hollande.
A la fois comme parlementaire et comme responsable du Parti Socialiste Je n’ai cessé, avec bien d’autres, d’alerter, de tenter de convaincre le pouvoir ! en vain ! Il faut se souvenir qu’au même moment aux USA Barack Obama, lui, nationalise Général Motors pour sauver l’industrie automobile !
Dès lors, Mittal a bien compris qu’il sera durablement en position dominante face aux pouvoirs publics français !
Le comble est que de surcroit la famille Mittal bénéficiera de 100 millions des fonds de cohésion de l’UE entre 2014 et 2020 ! et d’ailleurs un aciériste américain aussi.
Mais tout cela sans stratégie globale de filière tant des Etats membres que de l’Union, alors que la concurrence mondiale s’exacerbe.
Comme de coutume les instances européennes tergiverseront pour hausser les droits de douanes face au dumping chinois et surtout seront incapables d’organiser une riposte garantissant notre souveraineté dans ce secteur clé de l’acier alors même que des surcapacités internationales de production s’accumulent et que Mittal, comme d’autres producteurs mondiaux envisagent de fermer un grand nombre de sites en Europe !
Face à cela, les Italiens ont récemment réagi et annoncé la nationalisation d’un des plus importants hauts- fourneaux d’Europe !
Le parlement de Grande Bretagne vient de délibérer pour nationaliser leurs deux derniers hauts-fourneaux pesant ainsi sur le propriétaire indien qui voulait les fermer !
Les menaces se profilent aussi en France et se concrétisent avec les récentes annonces de Mittal. Mais le gouvernement français semble n’avoir rien vu venir et nous fait croire qu’il espère obtenir des concessions de Mittal ! D’une part on connait hélas la succession de promesses non tenues de la multinationale, d’autre part c’est reculer pour mieux sauter et rester prisonnier de ses intérêts.
Rappelons-nous, il y a peu encore, le groupe annonçait des investissements largement subventionnés par l’Etat pour la production décarbonée et maintenant on prévoit des réductions massives d’activités.
C’est pourquoi, il ne faut plus trainer, ni tourner autour du pot.
Comme nos voisins italiens et britanniques il faut voter de toute urgence une loi permettant la nationalisation de tout ou partie des sites français d’Arcelor-Mittal.
Une nationalisation qui peut avoir une vocation temporaire, qui peut prendre la forme d’une entrée décisive au capital et en tout cas permet de créer un rapport de force pour définir un cadre stable, durable pour l’avenir de la production d’acier en France , garantissant notre souveraineté et engageant sérieusement la décarbonation !
Le gouvernement va nous dire que nous n’avons pas les moyens! mais la situation italienne ou britannique n’est pas meilleure et des actions de cette entreprise ce n’est pas une dette mais des actifs ! Qui plus est rapportent!
Il sera grand temps ensuite d’obtenir des instances européennes la définition d’une stratégie de filière en Europe, en déployant au mieux la complémentarité de nos savoir-faire et capacités. Cette démarche doit être intergouvernementale et engager les pays volontaires car sinon il va falloir attendre un siècle et nous aurons déjà perdu beaucoup d’usines, de capacités, de savoir-faire et d’emplois !
Ne nous laissons pas endormir par les paroles lénifiantes du ministre de’ l’industrie, imposons la nationalisation !